Petite étoile.

Putain, 
Quel chariot m'a amené, 
Un matin de décembre ? 
Quel con m'a déposé ? 
Quel con m'a démembré ? 
Retour sur ma naissance. 
Comment peut on aimer, 
Ce qu'on rejette au fond, 
De toute sa sueur 
De toute sa pâleur ? 
Je ressens tous ses cris, 
Et ceux de ma douleur. 
Ceux d'une colère étrange, 
Du mal qu'elle peut me faire, 
Du mal qu'elle se donne 
Pour que n'existe pas, 
Cette petite balle en elle. 
Cette poussière d'étoile, 
Qui a pourtant choisi, 
De s'accrocher, de s'arrimer, 
Ici et pas ailleurs. 
Dans ce ventre hostile, 
Qui ne sait pas grossir. 
Dans cet écrin étroit, 
Où je peine et respire, 
Le doux parfum d'une mère, 
Et l'amer de la vie. 
Combien j'ai pu crier, 
Bien avant que de naître. 
Ma naissance fut acquise, 
Au mépris du réel 
De cette robe corsetée 
Sur mon front innocent. 
Je brille déjà pourtant, 
Je rue et je palpite, 
Mais tout est étouffé. 
Jusqu'à mon moindre souffle. 
Je souffle comme je souffre. 
Rêvant de liberté... 
Combattant réuni des causes incertaines, 
Ami de la Commune et des foules orange, 
Ami de la lumière, des orages et des vents. 
Je crie. Je pleure. Je vis. Je meurs. 
Mais c'est trop tôt encore, 
Le film commence à peine; 
On rit de cette méprise. 
Je vis de cette bêtise. 
Pas encore vu le jour, 
Pas encore vu la nuit. 
Le soleil et la lune 
Font partie de moi-même, 
Malgré les écrans sombres 
Déjà posés sur moi, 
Je lève le rideau et crie : 
« Je vous emmerde ». 
J'y suis, j'y resterai, 
J'ai des choses à y faire. 
Pas vous certes ; tant pis ! 
Je reste, je prie, je ris. 
Il est des hommes, il est des femmes, 
Pour qui je suis venu. 
Que personne ne s'avise, 
De barrer mon chemin, 
De tuer mon destin. 
Ma vie est mon sentier, 
Et j'entrevois enfin, 
La lumière pressentie. 
Finirez vous enfin, 
Par aimer qui je suis.
© Eric Benoit