05/05/20 - Jour 48 - Jeux de dupes et choix du Choc


Déjà 8 jours depuis le dernier billet... 
Les sujets ne manquent pourtant pas... 
Justement ! Ce temps apporte un peu de distance avec le brouhaha permanent qui nous enserre et que les uns et les autres entretiennent savamment pour que persistent la confusion, la peur et leurs objectifs. 
Bon, avec ça, je sens que l'optimisme a tendance à s'éloigner pour tendre à ne plus devenir qu'un lointain souvenir de début de confinement, de prise de conscience généralisée, de belles paroles et de grands enjeux. 
Désormais, de quoi parle-t-on ? De déconfinement évidemment, de départements rouges et verts, de masques obligatoires mais pas gratuits, de traitements efficaces mais pas efficaces, de vaccins à venir, de traçage des personnes mais, juré, il y aura un débat, d'école obligatoire pour ne pas perdre ce lien social et laisser sur le bas-côté les déshérités de la culture et de l'éducation... Et c'est pour ça qu'on rouvre les classes en commençant par les plus touchés : les enfants de 2-3 ans ! etc etc etc... 
On noierait n'importe quel poisson avec un flux tellement brouillé, confus, contradictoire, stupide et conventionnel. 
Mais comment ne pas les voir venir avec leurs gros sabots ferrés et dorés à l'or fin ? 
 
La première des confusions est celle à laquelle se sont prêtés le Président Macron et son 1er ministre dans leur numéro de la
Piste aux étoiles : l'Auguste et le Clown blanc. 
L'un et l'autre se complètent et se répondent parfaitement pour maintenir l'illusion, en même temps que la réalité passée reprend sa place. 
Le Président Auguste nous la jouant sur l'air de tout va changer dans un nouveau monde merveilleux, auquel je suis le premier à avoir cru, à avoir voulu croire. L'hôpital en devenir, la reconnaissance des métiers si mal payés et essentiels, la relocalisation des industries stratégiques, la reconnaissance des erreurs passées, le mea-culpa ténu mais bien là, le « quoiqu'il en coûte... »... 
Le ministre Blanc (surtout sa barbe), revenant à la réalité des choses et passant les absurdes priorités du retour à l'économie, les lois sur le nombre d'heures travaillées, le retour à l'école des plus petits, les masques à faire soi-même, les aides massives aux grands groupes et le satisfecit global quant à la gestion de la crise. 
Le Président Auguste va rendre une visite passionnée au professeur Raoult, le ministre Blanc nous dit tristement qu'il n'y a toujours pas de traitement. 
Le Président Auguste reconnaît les ratés, les erreurs, le ministre Blanc nous dit très sérieusement que tout a été géré comme il le fallait, que nous avions des masques en quantité et, horreur, « que l'hôpital public a tenu » étant sous-entendu que rien n'était donc à changer.... Odieux ! Tête à claque ! 
Le Président Auguste déclare que nous sommes en guerre, le ministre Blanc annonce les mesures révolutionnaires de l'ouverture des magasins de tissu ! 
Le Président Auguste s'offusque et réagit face au décrochement scolaire, le ministre Blanc annonce la rentrée des maternelles ! 
Le Président Auguste se montre volontaire et déterminé, le ministre Blanc annonce des mesures du « oui mais » (plus que du « 11 mai ») : les écoles ouvrent à nouveau mais les maires peuvent décider le contraire, les enfants retournent à l'école mais sur base du volontariat (évidemment, les enfants des familles obligées de travailler n'auront d'autre choix tandis que les autres préserveront la santé de leurs enfants), les enseignants se démerderont comme l'ont fait les soignants ! Avec pour aide-mémoire une consigne sanitaire inapplicable de 63 pages !  
 
Tout ça ne porte pas d'autre nom que celui de la MANIPULATION 
Telle que l'illustre la grossière opération de limogeage du directeur de l'ARS du grand-est qui avait annoncé la suppression de centaines de postes à l'hôpital en pleine crise (voir l'article du « jour 21, le 6/4 – nation apprenante »). Cet imbécile s'était bonnement contenté de continuer à diffuser ouvertement la politique que le gouvernement s'appliquait à camoufler dans cette période trouble. On a fait sauter le fusible pour maintenir l'illusion. 
Et plus récemment la note, élaborée à la demande d'E. Macron, de la Caisse des dépôts et consignations relative à un plan pour l'hôpital public (révélée par Médiapart le 1er avril 2020 https://www.mediapart.fr/journal/france/010420/hopital-public-la-note-explosive-de-la-caisse-des-depots?onglet=full). Ce plan, comme on aurait pu s'y attendre, vise à accélérer la marchandisation de la santé et sa privatisation rampante, en particulier au travers des PPP (Partenariats Public Privé) dont on sait depuis leur lancement (par Sarkozy je crois) qu'ils sont des ponts d'or pour les grands groupes privés (Vinci, Bouygues, Boloré...) et des gouffres financiers pour les finances de l’État, ce qui a été pointé par la cour des comptes. 
Le doute n'est plus permis quant à leurs véritables intentions ! Hélas 
 
Le jeu de dupes se poursuit dans la peur qu'on entretient soigneusement, à coup de chiffres bruts de décès, de masques indispensables, de distances à respecter, de couleur rouge dans les départements, d'absence de traitement, de vaccins en devenir,,. Une peur faisant partie intégrante de la théorie du choc largement décrite et dénoncée par les intellectuels, en, particulier Naomi Klein : 
 * choc de « l'état de guerre » 
 * choc des images d'infirmières épuisées, des hôpitaux saturés, des fosses communes... 
 * choc visuel de la population masquée (je vous jure que j'ai eu les foins en voyant Macron et Blanquer avec leurs masques noirs de croque-morts, même rehaussés par un discret bandeau aux couleurs françaises ! 
 
Le choc provoqué, installé, entretenu permet tout : une politique sécuritaire renforcée, encore, et un droit de contrôle permanent et absolu (les caméras, la reconnaissance faciale, les applications de traçage, la vaccination obligatoire.. ). Il permet d'entretenir la division et ce que N. Klein nomme le corporatisme, c'est à dire un État bien présent, mais au service du principe du libéralisme et des grandes entreprises. 
Cette division se creuse au cours des crises qui permettent l'instauration de l'état de choc, on le voit encore avec les mesures de re-scolarisation, la scission de la France en deux avec ses départements rouges et les autres verts, la maltraitance accrue des zones défavorisées comme les banlieues du 93 où le confinement n'est que le précurseur de la faim, mettant des familles en détresse alimentaire, où les mesures permettent d'accroitre l'écart entre ceux qui peuvent prendre l'air de la campagne quand les autres sont stockés en HLM. 
 
Pour ce qui est du caractère « provisoire » des mesures et lois de l'urgence sanitaire, il est tout à fait connu, et Amnesty International s'en inquiète, que l'effet cliquet est le même que pour le prix de l'essence. Dès que l'état d'urgence sanitaire sera levé, seule une partie (infime) des lois adoptées disparaitront, le reste passera dans la loi habituelle. 
 
Et pour bien verrouiller le système, le « médical » n'a pas été oublié, avec ce que l'on sait (surtout ce que l'on ne sait pas) sur les traitements, les essais et les intérêts en jeu. Ce point fera l'objet du prochain article... 
 
Voilà donc un « Jeu de dupes » bien ficelé, bien huilé, grossier mais efficace...
Mais, mais, mais il ne tient qu'à nous de le refuser ! Et nous tourner vers la face potentiellement positive de la théorie du choc décrite par Naomi Klein qui, si elle peut augurer du pire, permet aussi de fédérer des forces dispersées en engendrant des séismes bénéfiques à notre planète et à l'humain, tels que cela s'est produit après la crise de 1929 ou après la deuxième guerre mondiale, avec d'un côté le New Deal du Président Roosevelt et de l'autre les « Jours heureux » du Conseil National de la Résistance.

© Eric Benoit