... à partager. Je les ai aimés... pas forcément tous... Et vous ?
1. Un pedigree – Patrick MODIANO 
Octobre 2024 
C'est vraiment la vie de Jean Patrick MODIANO mais une vie qui semble ne pas être vécue, en arrière-plan, un peu lointaine et plutôt « subie », où chaque événement semble se dérouler à son insu... ; une suite d'événements dont il ne serait qu'une sorte de spectateur ou d'acteur animé par d'autres, d'événements qui se déroulent comme un décor derrière lui, à l'image de la vie en transparence qu'il évoque, à ces scènes de cinéma où les acteurs immobiles évoluent devant des décors qui eux, défilent.... Le style du livre, sténographique, listé, soutient parfaitement le récit en le rendant émotionnellement perceptible. On sent une forme d'indifférence envers ce qui lui arrive, ce qui se passe autour, comme s'il y était étranger, tout en vivant les souffrances, abandons et blessures infligées. 
J'ai par moment eu des doutes sur le fait que ce soient là des souvenirs tant ils sont précis, circonstanciés et agrémentés de nombreux personnages et noms, adresses, sociétés... 
2. La confusion des sentiments – Stefan ZWEIG 
Septembre 2024 
Quelle magnifique écriture et quelle exploration encore des esprits et des sentiments. Sur un sujet tellement sensible et où il est tellement facile de tomber dans un excès ou l'autre, l'homosexualité.  
Une histoire d'amour avec un grand « A » traitée avec sensibilité et mesure autant que compréhension, à une époque, avant guerre où l'on en était si loin (quand certains le sont encore aujourd'hui). 
Histoire vécue ? de l'étudiant et de son maître (passionné, passionnant, enseignant à la façon du « cercle des poètes disparus » …) qui, dans ses comportements mystérieux et incompris d'abord, révèlent leur origine dans l'aveu d'un amour « interdit » … 
Un peu la chanson « la plus belle fois qu'on m'a dit « je t'aime »...c'est un mec qui me l'a dit... ». 
 
3. Vingt-quatre heures de la vie d'une femme – Stefan ZWEIG 
Septembre 2024 
Dès que l'on rentre dans l'univers de Stefan Sweig, on est happé par le récit et la manière avec laquelle il pénètre, comprend, décrit et dissèque les rouages de l'esprit de ses personnages, avec une précision extraordinaire et dans un style qui ne l'est pas moins. Tout en maintenant un suspens et un intérêt qui rend difficile le fait de lâcher le bouquin. Je suis séduit aussi par le caractère un peu suranné des histoires qui se déroulent toujours dans des lieux d'une autre siècle, le monde d'hier, pour paraphraser l'auteur. 
 
4. L'homme-joie – Christian BOBIN 
Août 2024 
La poésie de C. Bobin est aussi celle de R. Desnos, de A. Rimbaud dans les illuminations. Elle laisse dans un marquage subliminal, une trace indélébile, imprime des lumières et des grâces, ouvre des horizons impossibles et bannit définitivement les frontières entre les réalités. 
Je me laisse porter au gré des mots pour les laisser agir, infuser et s'imprégner en révélant leurs effets sur mon esprit. Simplement, sans chercher à intellectualiser, comprendre, encore moins rationaliser. Tout est dans l'éther des mots et ce qu'ils suggèrent. 
5. Le Murmure – Christian BOBIN 
Mai 2024 
J'accède à un autre monde. C. Bobin éclaire des portes dérobées, donne accès à des plans de réalité non-ordinaire ; la compréhension se fait au delà des mots, en dehors des mots, en dépit des mots. 
De page en page, je pressens la mort. Non comme une menace mais une sorte de suite logique de dramatisée de ce qu'il vit. Puis elle devient soyeuse, fréquentable et ne se distingue plus de l'amour, de la vie. Une sublimation dont C. Bobin tire les plus belles phrases qui flamboient dans un bouquet final, bien plus fort, bien au delà des mots, où il tutoie la douleur pour l'adopter. 
J'assiste, je participe à un changement de paradigme !! La vie, la mort, l'amour, l'arbre et moi, quelle différence ? 
Légère digression... : Au moment où je termine ce livre, je venais de voir un reportage sur la montée des nouvelles puissances alliées que sont la Chine, la Russie et l'Iran et qui défendent une autre vision du monde ; je me dis que si ce n'était les régimes autoritaires qu'elles emploient pour les défendre (ce qui, je le reconnais, n'est pas un détail), opposées au monde occidental qui voudrait imposer ses valeurs (quelle démocratie ? Celle de l’hégémonie des E.-U. ? De ses systèmes d'espionnage ? Des révolutions et groupes terroristes qu'elle a financés pour préserver des intérêts économiques ? De la négations de la parole du peuple dans un référendum (France / Sarko)? De la manière dont on écrase en France les contestations à coup de répression violente et d'intimidation policières et judiciaires ? De la manière dont on récupère un vote pour oublier vite les promesses et en faire un blanc-seing pour réaliser ses lubies libérales, asseoir un pouvoir exécutif plus fort, écraser le législatif...? Nous n'avons pas de leçons à donner!!!) 
Comme avec Montaigne mais d'une manière poétique, on adopte la mort comme on nous donne la vie. 
Je suis bouleversé, dans tous les sens du terme. Psychologiquement et dans la vision des choses, dans leur appréhension... Tout à coup, d'autres axes de compréhension se présente, compréhension du monde et de la vie, de la « réalité ». 
6. Chien de printemps – Patrick MODIANO 
Mai 2024 
C'est un livre que j'ai trouvé attachant et prenant, autour du souvenir d'une personne, et d'une pelote qui se déroule en oscillant entre précision et contours flous. 
C'est une sorte de partie de cache-cache, avec le passé, les souvenirs qui s'étirent avec le temps et se fondent au présent, comme le réel avec l'imaginaire, des personnages et des lieux, du narrateur même au personnage principal. Des souvenirs qui semblaient lointains au début mais s'avèrent précis jusqu’à rejoindre le présent en s'y mélangeant dans une sorte de « no man's land ». 
Fondu enchaîné entre les temps... Tout se fond, devient nébuleux, incertain, vécu, réel ou inventé. Le récit est à cheval sur cette frontière... illusoire ? Un rêve éveillé où tout finit par se rejoindre. 
Sensation d’évanescence. Les choses sont affirmées, les souvenirs clairs, sûrs puis...plus tout à fait, plus dut out. Cette personne, ce souvenir, est_il vraiment réel ? 
Mystère de la vie, du double, de la réalité, du rêve, de la conscience et du trou noir... 
7. Fendre l'armure - Anna GAVALDA 
Avril 2024 
Quelques nouvelles aux personnages tranchés et parfois attachants mais quelquefois trop... tranchés, et prenant une allure artificielle à laquelle je n'arrive plus à croire. Plaisant à lire avec l'écriture d'Anna Gavalda, précise, travaillée et fluide. 
 
8. Immortelle randonnée – Jean-Christophe RUFIN 
Avril 2024 
JC Rufin nous emmène avec lui sur la camino del norte en direction de Compostelle. Entre le récit amusé, amusant et les réflexions, changements ou bouleversements qu'apporte le périple, il nous livre une déclinaison du chemin, celui que des centaines de milliers de pèlerins font chaque année, selon des modes et avec des motivations bien différentes. Une déclinaison où, si elle est évidemment personnelle, son expérience marque à quel point cette expérience permet de sortir de soit. 
J'y ai retrouvé nombre de points connus et rencontrés mais aussi, et c'est heureux, un tas de différences. Donc à ne surtout pas prendre pour une vérité, ce qui pourrait parfois transparaître dans le récit... 
9. Le plâtrier siffleur – Christian BOBIN 
Mars 2024 
Quelques pages... un concentré de bonheur, d'humanité, de retour suscitant une révision complète des nos valeurs, un retour au centre.... 
Tellement dense qu'il me laisse pantois et rêveur, embrumé, nécessitant de le lire et le relire. Il me laisse la même sensation que le regard du personnage principal du film de Wim Wenders « Perfect days » lorsqu'il contemple la cime des arbres du parc où souvent il prend son déjeuner... 
10. Le procès – Franz KAFKA 
Mars 2024 
C'est un fourmillement de détails, des lieux, des personnages, des pensées... On entre dans l'intrigue et on vit chaque moment avec le personnage principal, K.  
K dont on ne connaît que l'initiale et assez loin dans le livre, le prénom : Joseph … L'intrigue ne se dévoile que petit à petit, se perd, se transforme, maintient en haleine. Elle prend de l'ampleur en dévoilant une chose après l'autre ; une intrigue étrange dont on ne sait pas grand chose : un procès intenté à K... Pourquoi ? 
Mais on sent monter la gravité et les emm... 
FK cultive l’ambiguïté, le questionnement, le mystère, la suspicion, en tout et crée une atmosphère inquiétante... 
Impossible de démêler le vrai du faux... Chaque parole est contredite. 
Une sensation de malaise se développe en même temps que ceux que subit K. On les ressent dans notre chair. 
Les développements sont parfois complexes, ce que traduit le style et les phrases qui peuvent l'être également. 
 
En tout lieu, il n'existe aucune intimité : cloisons fines,pas de délimitation, bâtiments contigus qui se confondent, bureaux les uns à côté des autres, personnages qui s'invitent et savent déjà tout... 
Tout le monde sait tout sur tout... Les gens parlent par allusions en faisant bien penser à l'intéressé qu’elles ne le concernent pas. 
Une justice d'une opacité complète : personne ne sait rien et ne dois rien savoir. Centre de sévérité et de corruption, d'orgueil ...Aucun droit ni transparence. 
Le procès démarre par une sorte d'irruption inquisitrice au domicile de K puis évolue vers uen certaine légèreté avant de se compliquer au possible dans un labyrinthe absolu. L'emprise devient totale sur l'individu et le lecteur... 
Et plus le procès semble prendre de l'ampleur, plus K est soumis au vent de filous ou d'escrocs : l'avocat, le peintre, le négociant... se trouvant toujours à rencontrer K dans des moments propices... Jusqu'à devenir presque burlesque sans qu'on en soit certain puisque K , si intelligent, finit par se soumettre à leurs paroles et passer d'un avis à son contraire... 
Tout est très théâtral... 
 
Chacune des décisions importante que va prendre K est immédiatement mise en vrac par un nouvel intervenant qui appairait opportunément, comme si tout était manigancé par un fil rouge … du destin (presque le « Truman show » dont nous sommes les spectateurs). 
Les situations s’enchaînent pour que le thème du récit, l'atmosphère qui s'en dégage et les personnages croisés dégagent une sorte de parabole symbolique se voulant édifiante. Ce qui apparaît de manière évidente avec l'interpellation de l'abbé dans la cathédrale... 
Mais sous le couvert léger d'un mystère absolu et noir du fonctionnement social et de la justice, la fin n'en est pas moins subite et brutale.... 
 
11. Changer l'eau des fleurs – Valérie PERRIN 
Janvier-février 2024 
Un très beau roman, ciselé dans l'écriture vive et dans la manière dont il est conduit. Un récit mêlant tous les ingrédients : amour, malheur, deuil, sentiments, humanité, méchanceté, bêtise, platitude et folie etc... Tout cela à travers un ensemble de personnages attachants ou exécrables, dans un fil non chronologique très travaillé basculant d'une portion de l'histoire à l'autre car cette histoire unique se décompose sous la plume de l'auteur en de multiples histoires qui se mêlent et s'entremêlent pour se retrouver. 
On sent derrière l'auteur la patte du scénariste affûté. 
 
12. Le médecin de campagne - Honoré DE BALZAC 
Juillet 2023 
Avec Balzac, on entre toujours dans un univers descriptif précis et détaillé des mœurs, des lieux, des personnages. L'histoire n'est alors que prétexte à cette description comportant des passages passionnants et d'autres un peu plus laborieux. 
Je suis néanmoins transporté dans ce coin de la Chartreuse révélant le destin de ce médecin bienfaiteur lors de l'accueil d'un visiteur, officier de l'armée napoléonienne. 
Outre le descriptif des mœurs, Balzac aborde souvent les aspects politiques, religieux et moraux, prêtant certainement sa vision personnelle aux paroles de ses personnages.  
Ce sont alors quelquefois des partis pris que je trouve excessifs, surtout dans les tirades moralistes, sur ce qui est bien et ce qui ne l'est pas, ce qui convient ou pas... L'ordre et le conventionnel. Excessifs, parce que ses avis sont « non discutables », établis comme des vérités tranchées, sans nuance... 
On notera aussi des avis sur les juifs, leur comportement, le faciès...assez troublants... 
Quant au religieux, la référence y est quasi permanente. 
Napoléon est un personnage assez central du livre, faisant référence à toute son « œuvre » et la gloire associée. 
En complément de ces dissertations tranchées se trouvent des discussions sur le pouvoir et les élections, les pauvres et les riches, les droits associés à ces catégories respectives qui sont tout autant tranchées (Le droit de vote et plus encore tout pouvoir ne peut être donné aux pauvres populations qui n'ont pas la capacité de l'exercer et doivent rester reléguées au peu qu'elles savent faire... !). 
Le déroulement du livre amène une série de petits essais intéressants (même si l'on n'est pas du tout d'accord...) sur un ensemble de sujets de société ; le pouvoir, les liaisons amoureuses, le suicide (et le droit absolu de vie ou de mort sur soi-même...). 
 
13. Béni soit le père – Rosa VENTRELLA 
Juillet 2023 
Déclenchée par l'urgence de se rendre auprès de sa mère victime d'une AVC, Rosa Ventrella raconte l'histoire d'une vie meurtrie par un père maltraitant et bercée par l'amour d'une mère blessée, résignée et soumise à la « fatalité » de la survie auprès d'un homme violent, égoïste, haineux... 
Le cheminement d'une vie où elle subit ce qu'elle a rejeté et haï, où elle sent se reproduire l'histoire. 
Le cheminement du regard et de la perception, la force de l'oubli ou du pardon qui transforme ce père haï en un vieillard écrasant même une larme sincère, vieillard qu'elle aurait pu se prendre à étreindre. 
Rosa revient souvent sur l’importance du regard porté sur soi. Celui qui fait se sentir beau ou laid. Celui qui fait se sentir digne d'être aimé ou pas. Celui du père qui néglige, dédaigne, maltraite ou celui de l'amant... 
Son style est concis et limpide, en même temps qu'émouvant, adoptant selon le stade du récit, la première personne puis une adresse directe à sa mère. 
 
14. La Liberté ou l'Amour – Robert DESNOS 
Août 2022 
 
Sublime. 
Pourquoi j'ai lu ce livre... Parce que lors de la visite de l'exposition d'Ernest Pignon Ernest à Landerneau, j'ai été captivé par une représentation du poète et de son héroïne, Louise Lame. Et voilà... Merci EpE ! Merci Louise Lame ! 
C'est un récit poétique absolu et délirant, où les destins se croisent au gré des mots fous et des paradoxes existentiels. Absolue poésie, absolue liberté, Amour absolu. Absolue Liberté de l'Amour, s'affranchissant de la mort même, évoluant dans toutes les strates des réalités matérielles et éthériques, qui se côtoient sans se concurrencer, mais où l'âme affirme ses droits de suprématie sur ceux de la matière. 
Délire, folie, réalité, abandon, absolu, horizons sans limites, mots asservis au service de l'univers, mots crus et bruts au service de l'Amour inouï, inédit, ineffable, indicible. L'écriture conventionnelle ne pourrait que trahir cette réalité ; seule la poésie désaxée, désinhibée, libérée, démembrée, explosée, surréaliste peut approcher l'extrême de l'Amour, l'extrême de la Vie dans une beauté cristalline dégagée de toute convention, où tout est permis, de dépassement, de sensualité et d'érotisme fulgurant, sans jamais l'ombre d'un excès puisque de limites il n'y en a pas. Pas plus dans les mots que dans ce qu'ils expriment des obsessions totales et folles. 
Je n'oublie pas la forme littéraire, où on les avale avec avidité les très longues phrases se déroulant avec fluidité. 
Desnos et Rimbaud sont frères et compagnons dans le paradoxe total de cette capacité à dire, à exprimer ce qui ne peut l'être. 
Robert Desnos, dans le firmament de ta fulgurance, te reconnaîtras-tu si je t'appelle ainsi : Compagnon rimbaldien de la prose idéale ? 
Ce que je comprends, ce que je saisis de ce texte, c'est ce que je ressens physiquement. Aussi indicible dans un langage « normal » que l'est le récit de Desnos dans son extra-ordinaire univers. 
Cette poésie n'active aucun des sens habituellement stimulés par l'écriture (réflexion, mental, pensées...) mais se fixe dans le corps. Elle laisse comme une trace indélébile en moi, un arrière goût indéfinissable et persistant dans l'infini. 
L'expression poétique rejoint un univers très spirituel où tout est « un », unité absolue. Où rien ne distingue l'humain de l'arbre ou du minéral, tel ce pavé qui s'exprime, vit, raconte, parle de son vécu, déverse ses souvenirs. 
Il n'y a plus ni espace ni temporalité, tout est permis et possible dans le monde où évoluent les deux personnages, Louise Lame et Corsaire Sanglot. 
Cette prose est faite pour n'en rien retenir qu'un long et voluptueux fleuve de sensations tactiles. 
Desnos me laisse pantois, pantin désarticulé. Il déstructure tout et termine dans une apothéose réunissant l'essence, avec une fin...sans fin... L'éternité ? 
 
Pour étayer mes propos, je ne parviens pas à faire le tri dans ces quelques citations que je trouve magnifiques : 
 
La liberté ou l'amour _ Page 114, 
Les passantes.L'éternité 
Et s'il faut te suivre jusqu'au bout, je te suivrai ! 
Tu n'es pas la passante, mais celle qui demeure. 
La notion d'éternité est liée à mon amour pour toi. Non, tu n'es pas la passante ni le pilote étrange qui guide l'aventurier à travers le dédale du désir. Tu m'as ouvert le pays même de la passion. Je me perds dans ta pensée plus sûrement que dans un désert. Et encore n'ai-je pas confronté, à l'heure où j'écris ces lignes, ton image en moi à ta « réalité ». Tu n'es pas la passante, mais la perpétuelle amante et que tu le veuilles ou non. Joie douloureuse de la passion révélée par ta rencontre. Je souffre mais ma souffrance m'est chère et si j'ai quelque estime pour moi, c'est pour t'avoir heurtée dans ma course à l'aveugle vers des horizons mobiles. 
 
La liberté ou l'amour _ page 54 
Énigme... libérée 
« Qu'est-ce qui monte plus haut que le soleil et descend plus bas que le feu, qui est plus liquide que le vent et plus dur que le granit ? » 
Sans réfléchir, Jeanne d'arc-en-ciel répond : 
–une bouteille. 
–Et pourquoi ? Demande le sphinx. 
–Parce que je le veux. 
–C'est bien, tu peux passer, Œdipe idée et peau. Elle passe. 
 
La liberté ou l'amour _ Page 54 
La déclaration des droits de l'âme 
« de même qu'en 1789 la monarchie absolue fut renversée, il faut en 1925 abattre la divinité absolue. Il y a quelque chose de plus fort que Dieu. Il faut rédiger la rédaction de la déclaration des droits de l'âme, il faut libérer l'esprit, non pas en le soumettant à la matière, mais en lui soumettant à jamais la matière ! » 
 
La liberté ou l'amour _ Page 58 
La poésie _ Le poète et le comptable. 
Mais le corsaire Sanglot, la chanteuse de music-hall, Louise Lame, les explorateurs polaires et les fous, réunis par inadvertance dans la plaine aride d'un manuscrit, hisseront en vain du haut des mâts blancs les pavillons noirs annonciateurs de peste s'ils n'ont auparavant, fantômes jaillis de la nuit profonde de l'encrier, abandonné les préoccupations chères à celui qui, de cette nuit liquide et parfaite, ne fit jamais autre chose que des taches à ses doigts, taches propres à l'apposition d'empreintes digitales sur les murs ripolinés du rêve et par là capables d'induire en erreur les séraphins ridicules de la déduction logique persuadés que seul un esprit familier des majestueuses ténèbres a pu laisser une trace tangible de sa nature indécise en s'enfuyant à l'approche d'un danger comme le jour ou le réveil, et loin de penser que le travail du comptable et celui du poète laissent finalement les mêmes stigmates sur le papier et que seul l'œil perspicace des aventuriers de la pensée est capable de faire la différence entre les lignes sans mystère du premier et le grimoire prophétique et, peut-être à son insu, divin du second, car les pestes redoutables ne sont que tempêtes de cœurs entrechoqués et il convient de les affronter avec des ambitions individuelles et un esprit dégagé du stupide espoir de transformer en miroir le papier par une écriture magique et efficace. 
 
La liberté ou l'amour _ Page 87. 
L'ennui et l'éternité. 
Corsaire sanglots s'ennuyait ! L'ennui était devenu sa raison de vivre. Il le laissait croître en silence, admirant chaque jour qu'il ait pu encore augmenter. C'était l'Ennui, grande place ensoleillée, bordée de colonnades rectilignes, bien balayée, bien propre, déserte. Une heure immuable avait sonné dans la vie du corsaire et celui-ci comprenait maintenant qu'ennui est synonyme d’Éternité. 
 
La liberté ou l'amour _ Page 94 
L'abandon 
Prends garde, ne soit pas mon ami. J'ai juré de ne plus me laisser prendre à ce terrible PIEGE A LOUP, je ne serai jamais le tiens et si tu consens à tout abandonner pour moi, je ne t'en abandonnerai pas moins un jour. 
Je connais d'ailleurs, pour l'avoir éprouvé, l'abandon. Si tu désires cette hautaine luxure c'est bien, tu peux me suivre. Autrement, je ne demande que ton indifférence, sinon ton hostilité. 
 
15. Deuil pour Deuil – Robert DESNOS 
Septembre 2022 
 
Deuil pour euil poursuit, après « La Liberté ou l'Amour », la quête folle d'une réalité non ordinaire. 
Les épisodes subliminaux s'enchaînent et laissent persister dans ma « rétine » cérébrale les mêmes sensations folles de liberté et d'absolu. Des scènes surréalistes mettent en scène tous les fantasmes dont aucun n’apparaît ni fou ni démesuré ; les histoires fusent et crépitent, percutent les destins, bousculent les idées reçues et les valeurs, transfigurent la réalité ordinaire qui ne révèle plus rien d'invariant. 
Je suis successivement projeté dans des situations vécues, imaginées, des lieux connus* ou pas, des émotions directement transmises au corps. 
Dans la beauté superlative qui émane des femmes qu'il vit, Robert Desnos devait être un amoureux, amant éternel éperdu. 
Je chemine de tableaux en allégories plus beaux et plus émouvants les uns que les autres. La réalité est proprement réinventée, révolutionnée. La vierge blonde comme un leitmotiv, Les nouvelles transmises par les grains de sable... 
Réalité où tout est consacré dans une union totale, où tout se mélange, où les destins se croisent avec naturel, où tout est tout en même temps que son opposé (comme le comptable et le poète dont l'image revient encore). 
Robert Desnos interroge tout, magicien ayant tout compris, tout saisi dans la vie fugitive du poète comme le fut celle d'Arthur Rimbaud ou de Mozart dans la musique. 
Tout est dans les frontières et non d'un côté ou l'autre. La Vie et la Mort. Comme une sphère complexe où tout se tient, y compris le temps dont le sens n'existe pas, s'inverse, autant que les valeurs permettant de ne pas s'attarder sur les accessoires que sont les étoiles ou le soleil... Une pelote imbriquée, un univers sans début ni fin, où la réincarnation est toute naturelle, est nature. 
Pour terminer comme toujours dans une apothéose et un générique flamboyant, une parade merveilleuse. 
Une seule citation : 
Elle m'aperçut enfin et me dit : «  je suis et tu es et cependant je ne puis dire que nous sommes. La ridicule convention conjugale du verbe nous sépare et nous attire. J'ai des yeux merveilleux et des bijoux à damnation. Vois mes bras et vois mon cou. Un indicible amour naît en toi au fur et à mesure que je parle. Je suis la Beauté brune et la Beauté blonde. La triomphale beauté sans beauté. Je suis Tu et tu es Je. Des grappes de prunes pendent à mes doigts. Un cœur c'est aussi un petit pois qui germera ridiculement, dans la destinée d'accompagner de façon anonyme la dépouille mortelle d'un canard sauvage, sur un plat d'argent, dans une sauce richement colorée » 
 
* P127 : c'est à Honfleur que je suis... 
16. Indignez-vous – Stéphane HESSEL  
Août 2022 (relecture) 
 
Des mots simples mais tellement essentiels et encourageants, une histoire proche et tellement dévoyée, récupérée, et oubliée au fond... Même si le recul de quelques années seulement depuis la dernière édition ne porte pas forcément à l'optimisme, la force de l'engagement et de la confiance en l'homme dans ce qu'il a de plus droit et pur demeure intacte et la seule issue joyeuse. 
 
17. La panthère des neiges – Sylvain TESSON 
Août 2022 
 
La beauté de la nature se reflète comme dans un miroir dans la beauté poétique du récit. Celui d'une quête humble, avec des gens, humbles et vrais, sans fard (ce que ne permet pas une région aussi rude). Humble et respectueuse où chaque chose est à sa place et l'homme remis à la sienne. 
On s'émerveille devant les tableaux qui se dessinent et les bêtes qui se devinent… 
Mais le récit naturaliste ne peut que se mêler de considérations indissociables sur le monde, l'être humain, et l'amour qui finalement en est au cœur. 
Un aparté sur l'amour de sa vie dévoile ce que cet état peut révéler de plus beau. 
Il manie par ailleurs avec subtilité le subjonctif passé, sublimant le récit. 
Le texte est ponctué de références historiques, littéraires, artistiques, géographiques… Non pour nous imposer sa culture mais pour enrichir la nôtre par une subtile compréhension du monde. 
 
P 98 - « J'avais aimé quelqu'un moi aussi. L'amour avait fait son office : tout le reste avait disparu. … Je courais la terre et à chaque fois que je croisais une bête, c'était son visage évanoui qui m'apparaissait. Je la suivais partout. Quand Munier m'avait parlé de la panthère des neiges sur les bords de la Moselle, il ne savait pas qu'il me proposait d'aller la retrouver. 
Si je croisais la bête, mon seul amour apparaîtrait, incorporé à la panthère. J'offrirais chacune de mes rencontres à son souvenir défait » 
 
p 100 - « L'homme s'était autoproclamé chef du Politburo du vivant, s'était propulsé au sommet de l'échelle et avait imaginé une flopée de dogmes pour légitimer cette domination. Tous défendaient la même cause : lui-même. 
« L'homme est la gueule de bois de Dieu ! » Disais-je. » 
 
18. Poésies – Une saison en enfer – Illuminations – Arthur RIMBAUD 
Juillet 2002 
Magnifique préface de René CHAR qui avec une subtilité incroyable parle du poète et de son œuvre. De la poésie et de l'art en général. Il me semble que la façon dont il en parle, à l'image de cette chronique de S. Tesson (« un été avec Rimbaud ») est parfaitement en phase avec ce que j'ai saisi de l'insaisissable ce poète. 
Je pense que Rimbaud lui-même n'aura pas renié cette préface. 
Un poète qui échappe à tout. Une poésie absolue, absolument débridée, affranchie de toutes les règles qui entravent et peut ainsi pénétrer le monde subtil d'une autre réalité. 
 
19. Le chemin le moins fréquenté – Scott PECK 
Juillet 2022 
Passionnant. Ce livre est une pépite plein de révélations qui me mettent face à ma réalité, ce que je vis, j'ai vécu et tout ce que je ne sais pas, ne comprends pas forcément. 
Après avoir abordé sous un terme un peu rébarbatif tout ce qui tourne autour de la nécessaire discipline, S Peck en arrive à l'Amour en situant parfaitement ce qu'est l'amour, en quoi il se différencie du sentiment amoureux (p85), en quoi il consiste, de quoi il est fait et ce qu'il nécessite comme effort. Comme il advient et ce qu'il permet, ce qu'il révèle... 
l'Amour comme seul objet ayant pour objectif l'évolution spirituelle de l'autre. 
Un terme nouveau éclaire beaucoup de choses dans la différence entre l'Amour et le sentiment amoureux ; cette étape précédant toute relation amoureuse tout en étant bien différent de l'Amour : la cathéxis : « processus par lequel un objet (personne) devient important pour nous. Une fois « cathecté », communément appelé « objet aimé » , est investi de notre énergie comme s'il faisait partie de nous-mêmes, et la cathexis est la relation qui s'établit entre nous et l'objet aimé. » (p 125). 
Je distingue mieux toutes les pièces de la pensée. Ainsi que tout ce dont j'ai hérité en terme de conformisme, me permettant de boucler la boucle avec le travail que je fais sur moi-même, sur la trahison initiale de ma « non-reconnaissance »... 
Certains chapitres sont tellement forts et riches que j'ai besoin de les relire pour mieux les comprendre et m'en imprégner. 
Toutefois, il tourne parfois vers une forme de moralisation peut-être un peu excessive. Peut-être un peu trop affirmatif également... 
J'ai passé la partie sur la religion qui ne m'intéressait pas... 
 
 
20. Le petit prince – Antoine de Saint EXUPERY 
8/10/2014 – relu 14/2/17 – relu mai 2022 
A chaque relecture de nouvelles découvertes, sensations. De nouveaux éveils et des points qui touchent davantage selon le contexte dans lequel on le lit et surtout le point du chemin auquel on est parvenu. 
Il n'en reste pas moins merveilleux et éclairant dans cette faculté de l'enfant à s'émerveiller de la simplicité de la vie au même titre que s'affliger de la bêtise humaine, depuis l'adulte tuant les rêves de l'enfant jusqu'au businessman qui compte pour posséder...les étoiles. ON dirait Jeff Bezos ou Elon Musk, qui se disputent comme milliardaires la palme du plus grand imbécile, ne sachant plus depuis longtemps ni l'un ni l'autre ce que c'est que le parfum d'une fleur ou la lumière d'une étoile ! 
Là où les adultes ne voient que l'enveloppe de toute chose, si je ne devais retenir que trois choses, ce serait : 
« Les grandes personnes sont décidément très très bizarres » 
« On ne voit bien qu'avec le cœur, l'essentiel est invisible pour les yeux » 
« C'est une occupation bien jolie. C'est véritablement utile puisque c'est joli » 
 
21. Laissez-moi – Marcelle SAUVAGEOT 
Mars 2022 
Une lettre de rupture amoureuse qui comporte une part de lâcheté, et derrière, de mépris et de recherche de compensation stupide. Tout ce que refuse l'auteur qui reçoit cette lettre du fond de son sanatorium dont on sent le poids. Ce poids de la rupture et des conditions révélées par la lucidité de M Sauvageot. Un récit magnifique dans l'écriture, où la langue ets sublimée par le subjonctif, et dans les sentiments à la fois purs et vifs et crus. 
Ce livre sera le seul de cette auteure, qui mourra quelque temps après. 
«Et ce qui me fait souffrir, ce n'est pas tant la mort d'un amour mais celle d'un être vraiment vivant que nous avions créé l'un et l'autre...cet être était une union de vous et moi, tels que nous nous voulions l'un et l'autre » p52 
« vous savez que la résignation n'est pas le propre de mon être ; j'ai quelquefois l'apparence du renoncement, mais je médite toujours quelque moyen de « tourner » ce renoncement » p54 
« j'ai le vertige d'un vide où mon cœur privé d'amour se sent défaillir à la pensée des jours creux qui vont venir... » p65 
« ...Mais j'ai mal ; et, quand j'ai mal, je m'éloigne sans retourner la tête.. Ne me demandez pas de vous regarder par-dessus l'épaule et ne m'accompagner pas de loin. Laissez-moi.. » p 66 
 
22. Bélhazar – Jérôme CHANTREAU 
Décembre 2021 
Intrigué, happé par l'auteur qui le présente dans l'émission « la grande librairie ».... comme je l'ai été, en d'autres lieux, temps, circonstances, par « l'arbre du choix » de Nicole Canivenq, « ReVivre » de Guy Corneau, « prendre soin de l'âme » de Myriam Beaugendre... 
Ces livres m'ont tous emmené quelque part, loin parfois, permis de comprendre, intégrer, m'ont éclairé, illuminé... 
Il en est de celui-ci qui au travers de la mort de Bélhazar, jeune adolescent, découvre un autre monde, senti, pressenti, vécu par Bélhazar et que découvre progressivement l'auteur. 
Le livre débute par les faits et « l'enquête » qu'il commence à mener, sur base de l'impossible suicide de Bélhazar , version officielle du fait divers qui a mené à sa mort après son interpellation par des gendarmes. 
Mais après une enquête « terre à terre », JC se rend compte, intrigué par la personnalité de Bélhazar, de ce qu'il est, ce qu'il transmet, transforme, laisse... Il réalise qu'il est sur la mauvaise voie, qu'il se trompe et qu'autre chose est à percer derrière les faits. Quelque chose de plus subtil, de plus réel derrière la réalité, cet autre monde, ce monde à l'envers pour lequel Bélhazar laisse des traces, partout, en tout, à qui sait les lire. Et nous sommes emportés par la part irrationnelle de cette réalité, de ce monde lié aux ancêtres, ce qu'ils ont vécu, ces portes intérieures qu'il s'agit d'ouvrir... 
 
La qualité littéraire du livre, la qualité humaine et humble de l'auteur, nous permettent de sentir avec lui chaque doute et plonger progressivement vers quelque chose d'impalpable et non moins réel, élucidant sa mort au delà de ce qui était espéré même si cela se produit dans un cadre sortant du cadre ! 
Ce livre est l'univers du trouble et du paradoxe. Du questionnement aussi. De l'incertitude dans la certitude. Du réel imaginaire. De l'humilité dans la perception, de la recherche éperdue d'une vérité qu'on devine, qu'on sait ailleurs. Il aborde rationnellement l'irrationnel. Ou l'inverse ? Se met à l'écoute... de mots non dits, des traces, de l'énergie, de ce qui est et de ce qui reste ; du vent de Bélhazar. La mort est un compagnon permanent. Elle rôde. Ennemi ou bienveillante. Elle essaie. Renonce. Refuse. S'absente. S'entrouvre. Se referme. Pour chacun des personnages. Comme un simple paravent entre deux mondes que l'on explore. JC habite Bélhazar, explore la vie émanée de son passage. Les scènes s'animent, prennent vie quand il le rencontre subtilement, avec son ancêtre suicidé dans les tranchées de la Meuse. (Ce qui n'est pas sans me rappeler le lien que j'ai senti avec les poilus, « ceux de 14 » rencontrés dans les tranchées recouvertes des bois de Verdun). 
Ce livre m’emmènera-t-il aussi loin que les précédents... ? 
 
23. La brouille des deux Ivan – Nikolaï Vassilievitch GOGOL 
Novembre 2021 
Encore un livre court. Pittoresque et burlesque à la fois cette petite histoire humaine, de la bêtise humaine sacrifiant à l'orgueil une amitié qu'ils croyaient indéfectible. L'écriture de Gogol est toujours très théâtrale, constituée de scènes, de tableaux riches et aux lumières semblables à celles des grands peintres, tableaux que l'on visualise sans peine tant les descriptions sont précises et vivante. Une lecture tellement plaisante qu'on se sent emmené dans l'époque et eu cœur de l'intrigue. 
 
24. La mort viennoise - Christiane SINGER 
Décembre 2021 
J'ai eu un peu de mal à rentrer dans le livre... Peut-être l'écriture, riche mais parfois difficile dans des constructions de phrases un peu compliquées... 
Puis j'ai été convaincu, pris à la fois par le thème et ce qui s'y cache, ces histoires de vie, de mort, de recherche de sens, de recherche et de perception de la réalité aussi. Vienne au 17ème siècle, la peste, des gueux, des princes... Tout ou presque est transposable à notre époque et les métaphores, les messages ne manquent pas. Jusqu'au « consilium sanitatis » imposé pendant la peste « les maisons doivent être tenues propres, les entrées...les cours lavés à grande eau...les grands rassemblements sont interdits. La fréquentation des tavernes et des estaminets, déconseillée ; mariages et baptêmes devront se faire dans la stricte intimité... » (p 151)...En 2020, 2021... les mêmes mesures moyenâgeuses ! Vive le progrès... ! 
On comprend, on saisit, à travers les personnages, les enjeux de l'existence et l'on retrouve tant de sages rencontrés en guenilles à côté de ceux qui croient vivre, dans leurs habits princiers, coupés du monde et de la vie sans aucune forme de liberté, liberté que retrouve Éléonore, la princesse, restée à Vienne malgré l'épidémie et qui rencontre l'amour, les sentiments à travers la personne d'un médecin que son fils Johannes lui amène... Au milieu d'images atroces et brutes, on trouve les moments de grâce que nous offre la vie. Sous les croûte, le fumier et les apparences, le paradis... 
En bref, ce roman est aussi un très beau livre de Christine SINGER, dont l'écriture est réellement celle d'un écrivain, en plus d'être celle d'une femme éclairée, et éclairante. 
 
25. La maladie de Sachs – Martin WINCKLER 
Novembre 2021 
Dans la peau d'un médecin, vu des patients. Visite après consultation. Les gens. Leurs soucis, leur comportement, la banalité, le train-train sans jamais de train-train... Une plongée passionnante dans la vie, la vie des gens, sans intrusion, respectueuse. Ces gens que l'on reconnaît, ceux que l'on croise et ceux que l'on est. Car oui, à plusieurs, on (je) se reconnaît dans certains de ces angoissés, malades, inquiets... L'exercice de cette médecine d'écoute et de proximité libère tous les faux semblants, elle s'impose par la vérité du rapport à autrui et du lien, fidèle à cette version du serment d’Hippocrate qui débute l'ouvrage. C'est un livre à la fois passionnant, qu'on a du mal à lâcher et émouvant, touchant, percutant parfois par les paroles reçues et les liens établis donnant lieu à des digressions philosophiques sous couvert de la pratique littéraire du médecin, ce docteur Sachs/Winckler. 
J'ai, au tout début, eu un peu de mal à me faire à cette narration vue en permanence par le patient ; le narrateur changeant par définition lors de chaque chapitre/consultation/rencontre/visite. 
 
26. Longues peines – Jean TEULÉ 
Novembre 2021 
Un récit à la « Jean Teulé », à la fois brut, direct, au sein du milieu qu'il explore, et décalé en même temps, décalé par l'absence de parti pris, par la crudité des mots et de la narration. 
On se prend complètement dans cette description de l'intérieur du milieu carcéral, ses folies, ses absurdités, ses paradoxes, ses dévoiements, sa rudesse, sa violence « simple ». Une vie que l'on imagine que difficilement. La misère est bouleversante, celle des prisonniers bien sûr mais celle des matons aussi ; et que dire de celle de ce directeur de l'établissement, prisonnier au même titre, de même que son épouse sombrant dans la démence.  
 
27. Ménage d'autrefois – Nikolaï Vassilievitch GOGOL 
 
Octobre 2021 
Tout petit livre narrant la vie d'un couple de petits propriétaires terriens, épicuriens, aimant vivre au chaud, et bons. Bienveillants l'un envers l'autre. Leur destin au sein de cette vie commune et simple. La belle écriture de Gogol. On y est avec lui. On est dans ce foyer. Il fait chaud. Gogol retranscrit dans ce petit texte toute la chaleur du couple et ce pourquoi il les aime. 
 
28. Les cerfs-volants de Kaboul – Khaled HOSSEINI 
Octobre 2021 
On en apprend souvent plus et de manière moins distante avec un roman dont le fonds se déroule dans un pays en guerre que par tous les reportages d'information sur le thème de ce pays. 
L’Afghanistan. 
Entre deux guerres... Avec les Russes puis les Talibans... Les destins bien différents d'amis d'enfance, demi-frères sans le savoir. On découvre ce pays dans lequel une douceur de vivre existe, même dans la misère et avec l’affrontement des castes sociales, l'esclavagisme lié aux ethnies « condamnées » (les Hazaras en l’occurrence) et la condition défavorisée des femmes. Histoire terrible et émouvante où apparaît toute l'horreur et la destruction de ce pays par les envahisseurs barbares, qu'ils soient étrangers ou autochtones. 
Un roman dont le déroulement est plein de rebondissements, d'émotions et de violence. Prenant. 
 
 
29. Les travailleurs de la mer – Victor HUGO 
Octobre 2021 
Livre dont je n'avais jamais entendu parlé, se déroulant, comme son nom l'indique dans le milieu de la mer, des pêcheurs, des armateurs, des hommes durs au labeur, aimant, aimés, aux forces aussi invisibles que totales. 
Une histoire passionnante et tellement documentée qu'on en est parfois estourbi ! Merci au dictionnaire de la liseuse sans quoi un nombre incommensurable de mots me seraient restés inconnus. Les termes bien sûr mais aussi une connaissance parfaite de ce milieu, de la mer, de la navigation, de la construction des bateaux etc... Incroyable. V. Hugo est un véritable puits de connaissance et sans aucun doute d'une curiosité insatiable tant les sujets qu'il aborde sont fouillés. Les descriptions du Paris de l'époque dans « notre Dame de Paris » ainsi que de la vie d'alors l'étaient tout autant. 
L'histoire l'est aussi, incroyable, belle et rude, entre Giliatt, Mess Lethierry et Déruchette. Histoire d'un sauvetage ; incroyable aventure, mêlée à une histoire d'amour tout aussi absolue ! 
La Durande, ce fameux bateau à vapeur étant aussi un acteur à part entière. 
Au milieu de l'histoire elle-même sont insérés nombre de chapitres consacrés à des « digressions » en relation plus ou moins directe avec le récit. Des manuels de la mer, de la navigation, des courants marins, de la météo marine, des îles de Jersey, Guernesey, du mon marin mais aussi de philosophie de l'existence, du vide, du néant et du « rien » palpable dans la nuit noire au dessus des yeux de Giliatt perché sur l’écueil où il vivra dans le labeur et le dénuement pendant quelques mois. 
Des digressions qui parfois paraissent un peu longues... au milieu du récit que l'on a donc parfois hâte de retrouver. 
 
 
30. Change ton monde – Cédric HERROU 
Mai 2021 
Un livre vrai d'un gars vrai. Qui montre s'il en est besoin que les héros, d'aujourd'hui et d'hier ne sont pas des extra-terrestres qui ont décidé d'être héros mais sont simplement des gens ordinaires qui, face à l'humanité, ne détournent pas le regard et décident de tenir leur place d'homme. 
De quelle force un seul homme peut être capable, avec comme résultat de déplacer des montagnes et au final, d'aider des gens démunis et perdus, envers et contre tout, les politiques et les décisions abjectes. David contre Goliath évidemment. Qui ne désarme jamais, ne se décourage pas, malgré les pressions, l'intimidation, la peur qu'on instille à chaque endroit. 
Comme on le fait si bien en ce moment en nous privant de nos libertés essentielles avec la crise du Covid, si mal gérée pour tous, sauf au profit de ceux qui nous dirigent et sont en train de parvenir à instaurer par a peur et la violence, ce qu'ils ne peuvent sauver autrement, aidés par les médias et les grands profiteurs du lobby pharmaceutique. 
 
 
31. Leurs enfants après eux – Nicolas MATHIEU 
Mai 2021 
J'avais débuté la lecture en janvier, pour passer à autre chose ; je le reprend avec plaisir en avril. 
C'est un joli tableau d'une époque, les années 90, d'une région (La Lorraine du nord, le pays-haut), de mémoires, de vies qui se croisent et s'entrechoquent. Des vies et des destins d'abord communs puis qui se séparent. 
L'écriture est vivante et belle. Attachante et vraie. 
Je regrette quelques longueurs je trouve. Disons que ce bouquin pourrait faire 100 pages de moins peut-être. Mais peut-être l'atmosphère en serait changée. 
Je trouve aussi dommage d'avoir changer les noms des lieux qui, de fait, à mes oreilles, sonnent un peu faux (Heillange..), de même que les noms propres (Wandel pour de Wendel...). 
Mais c'est du détail, c'est un beau livre. Quant à ce qu'il ait reçu le prix Goncourt... je ne sais pas... 
 
 
32. Le miracle Spinoza – Frédéric LENOIR 
Avril 2021 – relecture 
Je relis la version poche et ma lecture est plus laborieuse, plus lente, moins enthousiaste qu'en 2018, plus poussive... J'y trouve moins d'enseignements. Question d'état d'esprit... J'en croirais même que le texte est édulcoré tant la substance me paraît plus lointaine. Ce livre si dense qui m'a guidé, enseigné, illuminé... 
Bizarre... Bizarre 
 
 
33. Joseph sous la pluie – Mano SOLO 
Janvier 2021 – relecture 
J'ai lu ce livre lorsque je l'ai acheté... En 96,97, 98 ??? 
IL y a bien longtemps. 
L'histoire d'un écorché vif dérivant, dérivant dans la vie et sur les berges du fleuve où il s'échoue sous les flots destructeurs et salvateurs à la fois. Tout est crudité et métaphores, tout est à vif, des plaies et des blessures, des cris et des pleurs et la vie. 
Plusieurs passages de la fin du livre ont été mis en musique et se sont retrouvés dans certains de ses albums. 
Joseph, dans les méandres de sa souffrance quotidienne, me ramène à ce que j'ai pu vivre parfois. Lorsqu'il vomit, c'est ce que j'ai craché hors de moi au Pérou qui me revient. Et dans ses moments de bien-être, courts, noyés au milieu d'un océan de souffrance, je retrouve le bonheur indicible ressenti lorsque cesse la douleur infinie des crises de calculs hépatique que j'ai connues. 
 
 
34. La Dame aux camélias – Alexandre DUMAS (fils) 
Septembre 2020 
Quel livre magnifique où la perfection, la précision et la fluidité de l'écriture ne trahissent pas les sentiments qu'elle relate. Je suis assez ébahi par la transparence avec laquelle se vivent les passions dans ce livre de même qu'avec la facilité avec laquelle se vivent les situations, en même temps que la lourdeur des conventions de la société, des classes aristocratiques et des autres... 
Je me suis laissé emporter par cette belle et tragique histoire derrière laquelle, il me semble, malgré la fin, se cachent l'espoir et la force de la Vie qui font que rien n'est jamais impossible si cela est vrai et juste. 
 
 
35. Balthazar, sa majesté des citrouilles – Laure-Emmanuelle MULLER 
Août 2020 
Balthazar m'a fait sourire, m'a ému aussi avec sa bande de copains, voisins, aussi typés que lui... et leur belle histoire de réconciliation villageoise. J'ai vu davantage encore les similitudes avec René, mon copain et voisin de la Drôme, dans ses comportements, ses cultures potagères, ses amitiés, le lieu géographique et sa topologie, ses yourtes aussi... presque tout y était pour le voir évoluer (Balthazar) dans l'environnement que j'ai connu à l'Adret des Cades. 
 
 
36. Une histoire d'âme – Christiane SINGER 
Juillet 2020 - 
Encore un livre profond. D'une profondeur absolue distillant des secrets, ceux de la Vie, la vraie, ce qu'elle est ou n'est pas. Nos mensonges à nous-mêmes, notre capacité à faire semblant d'exister, la réalité de ce que nous sommes et qui nous sommes, nous leurrant en permanence dans des jeux de dupes... 
Parfois, je trouve excessive cette vue des choses qui me semble intransigeante, ne pardonnant rien et relevant à l'absurdité toute relation qui ne serait pas entière, tout plaisir qui ne serait pas celui de la Vie, excluant toute compensation même partielle, anodine ou revigorante. 
Ce livre est difficile tant je sens cette insatisfaction permanente, ce mal être transpirant. Est-ce de la cruauté à son égard ou de la lucidité ? 
« Tout est nous, excepté ce que nous avons cru être nous ». Derrière ce constat et cette probable vérité, je ressens avec un certain malaise tant le bonheur me semble loin, une attaque en règle d'elle-même ? La destruction d'un être par la découverte d'un autre ? La recherche (tyrannique) de la réalité au delà de la réalité. 
Comme si al vie ne devait être que le terrain des expériences permettant de revivre, faire ressurgir les expériences antérieures déterminantes qui ont construit nos vies. 
Mais ceci dans un accouchement permanent, douleurs comprises. 
Où est la réelle place du présent ? La réalité est ailleurs, toujours ailleurs, plus loin, hors de la vie. Tromperie permanente. 
Aussi difficile soit-il parfois, ce livre celui d'un mystère éclairé... 
« Quelque chose, en moi, n'est pas né avec moi et ne mourra pas avec moi » p 135 
« Au moment de naître, l'ange de l'oubli frappe l'enfant sur la bouche »(Talmud) 
 
 
37. L'idiot Tome 1 et Tome 2- Fédor Mikhaïlovitch DOSTOÏEVSKI 
Juillet 2020 : tome 1 
Septembre 2020 : tome 2 
Je retrouve l'écriture si particulière, précise, vivante de Dostoïevski rapportant le fonctionnement des âmes manipulatrices, des desseins,des conventions, des sociétés et des individus dans des intrigues à la fois complexes, désuètes parfois mais dont les enjeux ne tiennent qu'à la valeur de ceux qui en sont les acteurs. 
Chaque personnage se découvre et se trouve souvent dénudé, parlant à cœur ouvert, libéré de nombre des entraves habituelles et nous livrant le fond de sa pensée, bonne ou mauvaise, dans de parfois longs discours ou monologues. Des paroles souvent vraies et sincères, intrigantes ou manipulatrices parfois mais finissant dans la sincérité le plus souvent. Les faiblesses derrières les forces et les forces derrière les faiblesses... 
Le Prince apparaît alors comme le personnage central et déterminant, tantôt aimé, adulé ou haï... pour les mêmes raisons, celles de sa simplicité absolue dans la sincérité du cœur, que rien ne semble pouvoir ébrécher. Dans une forme de passivité attentive dans la forme, il est dans la présence absolue et se livre autant qu'il permet aux autres de se livrer. Il est le véritable chef d'orchestre de tout ce qui se passe dans son entourage. 
 
C'est amusant comme, malgré les noms un peu compliqués pour nous, le nombre des acteurs... on retient avec facilité chacun des personnages, évoluant au milieu des scènes et intrigues, comme des tableaux dans un style tout à fait théâtral. 
On va de rebondissement en rebondissement, qui ne sont à chaque fois que l'occasion de creuser davantage les caractères profonds des personnages et leurs relations croisées, de leurs intrigues, de leur mièvrerie ou de leur beauté. 
Le XIXème siècle apparaît, au milieu des obligations et conventions de l'aristocratie, du maintien, de la position et de la stature des personnages, également comme un siècle de liberté où les choses se disent et se vivent avec une forme de légèreté ou plutôt de vérité qui n'est plus de mise aujourd'hui. 
 
 
38. Derniers fragments d'une long voyage _ Christiane SINGER 
Juin 2020 
Comme le titre le laisse présager, il s'agit du dernier livre de Christiane SINGER, un carnet des derniers mois de vie, six, que le médecin lui a annoncés dans un entretien qui me fait penser à celui que nous avions en juin 2010 avec l'oncologue de Christine, regardant davantage ses papiers, ses mains, ses clichés radio que nous-mêmes. 
Le récit est très émouvant et empreint d'une force de vie extraordinaire, d'une intensité inouïe dans chaque instant, dans chaque rencontre, dans chaque parcelle de temps. 
Il est en même temps terrifiant devant la douleur du corps, omniprésente et qui pourtant ne parvient jamais à dominer l'être. Ces douleurs qui, même évoquées de manière ténues, me renversent et me donnent presque la nausée tant je les perçois intimement. 
On y retrouve les aléas de la maladie, ses stratégies, les embellies, les répits et les dégringolades, les nuits blanches accrochées à la douleur mais surtout un fil rouge permanent et plus fort que tout, un émerveillement devant les choses et une acceptation de ce qui est, sans résignation ni regret, devant la richesse de ce qui a été vécu et continue, jusqu'au bout, de l'être, continuant à donner un sens à son existence. 
 
 
39. Notre Dame de Paris – Victor HUGO 
Juin 2020 
Bien sûr il y a l'écriture, fluide et prenante et précise et forte... Le dictionnaire de la liseuse n’est pas inutile avec les fréquents mots rares, en tout cas inconnus de moi... ! 
Le livre s'ouvre sur le tableau de la présentation du « mystère » à laquelle participent nombre de personnages plus ou moins illustres, d'invités flamands et le personnage principal : le peuple. 
On note là l'intérêt évident de V. Hugo pour ce peuple de Paris et d'ailleurs. Il le connaît si bien, de son apparence à son intimité et ses mœurs... 
On découvre Paris. Vraiment Paris, sous tous les angles. 
D'abord les personnages ébauchés, en toile de fond du livre. Puis Notre-Dame à travers les siècles, couche par couche, en détail, avec une leçon d'architecture. 
Les personnages principaux ensuite, Claude Frollot, La Esmeralda et Quasimodo. Le peuple de Paris, la cour des miracles. Les personnages sont d’abord aperçus, situés dans leur condition et leur « rôle » puis approfondis jusqu'aux tréfonds de l'âme. 
Puis le Paris du 15ème siècle et de ce que l'on pouvait voir du haut des tours de Notre-Dame, quartier par quartier, chaque hôtel remarquable, monument ou palais... On assiste à une visualisation d'un niveau de détail impressionnant, visionnant chaque entité à travers les mots. 
 
On perçoit déjà dans la description des personnages le mystère et l'intrigue qui les habitent. 
La société, l'église, l'alchimie, la monarchie, les bourgeois, le peuple, les déshérités, le roi, la monarchie, les jeux de pouvoir, les seigneurs... 
Puis on revisite le contexte de l'époque et la bascule qui s'effectue entre l'architecture (romane puis gothique) comme écriture de l'humanité, et l'imprimerie qui écrase celle-ci, progressivement et rapidement. 
Le livre est une alternance de description historique d'une finesse extraordinaire, tant de la société que de l'architecture et l'urbanisme du moyen-âge et d'une intrigue passionnante se déroulant au travers des personnages que l'on a d'abord rencontrés séparément avant de les retrouver liés par cette histoire folle. Claude Frollot, Archidiacre de Notre-Dame, brillant scientifique, alchimiste ténébreux et terrifiant, amoureux fou de la Esmeralda, qui sera aussi son bourreau par procuration, son jeune frère Jehan, protégé et qui mourra sous les coups de Quasimodo, recueilli par C. Frollot dont il l'esclave, La Esmeralda amoureuse folle du capitaine Phoebus, ami de Jehan Frollot, et la mère de la Esmeralda, la recluse volontaire par désespoir depuis 15 années dans un cachot sordide... L'une et l'autre réunies enfin au pied du gibet qui verra la fin des deux. 
Victor Hugo est à la fois un maître des intrigues, des croisements de destinées, spéléologue des âmes, tant celles des personnage principaux que celles du peuple se pressant aux spectacles de pendaisons, et un maître de la peinture littéraire de tableaux historiques des mœurs et des lieux dans ce courant du moyen-âge où l'inhumanité est partout, se chargeant de briser les destins et les vies... 
Les choses se sont un peu adouci à notre époque mais ont-elles vraiment changé ? On reconnaît les déviances d'aujourd'hui, dans ce prévôt de paris (Tristan Lhermitte), je reconnais le préfet d'aujourd'hui, petit seigneur dans la ville, maîtrisant et méprisant la populace à coup de CRS, gardes mobiles et gaz lacrymogènes et surtout de paroles marquant la différence des deux mondes qui s'affrontent, qu'il veut continuer à voir s'affronter. 
 
 
40. Le curé de Tours – Honoré DE BALZAC 
Mars 2020 
Mon premier Balzac... Il faut bien commencer un jour ! 
Évidemment, je ne vais pas commenter l'écriture, magistrale de précision et de subtilité du langage. 
On entre dans cet univers comme dans un livre ouvert sur l'histoire, la société, l'intimité des personnages. En l'occurrence toute la superficialité et la médiocrité possibles de l’âme humaine, appliquée à l'aristocratie de Province et au clergé dont seules les mesquineries, intrigues et coups bas prévalent pour parvenir à leurs fins. 
 
 
41. Le meilleur de soi – Guy CORNEAU 
Mars 2020 
Ce livre se présente comme une sorte de résumé, de condensé répondant à ce chemin qui est le mien, ses découvertes et ses éclairages m'amenant à être de plus en plus proche de moi-même. 
J'y retrouve le cheminement complet de l'être de ce qui précède la vie à la gestation puis la naissance et ses trauma associés. La constitution de la personnalité et des cuirasses physiques qui ne sont que le pendant de la personnalité (qui est une réduction) psychique. 
L'accès à l'inconscient grâce à la psychologie, la psychanalyse et... l'ayahuasca. 
Le rôle essentiel de l’écriture qui constitue un moyen d'avancée psychologique aussi efficace que tout autre, y compris le recours à un tiers. 
Et bien sûr, au centre, l'existence concrétisée par la manifestation de notre pouvoir créateur que nous recherchons inévitablement dans le regard de l'autre, dans la reconnaissance d'autrui si nous en perdons le fil. 
Notre place dans l'univers, le monde. L'énergie comme centre et lien omniprésent, croisant alors la spiritualité, la psychologie et la science par la physique quantique, l'intrication et notre lien universel. 
J'y retrouve des parallèles avec le bouddhisme où tout est création de l'esprit, tout né dans notre esprit. Ce monde n'est que la fabrication, la création de celui-ci. Ce que confirme le fait même que nous créons nous-mêmes notre réalité au travers des réseaux de neurones que nos états psychologiques induisent dans notre cerveau. 
 
 
42. Dans les forêts de Sibérie – Sylvain TESSON 
Janvier 2020 
J'avais aimé les « chemins noirs »... J'ai aimé « dans les forêts de Sibérie », récit que j'ai d'abord découvert par la BD qui en a été tirée. 
Comme S. Tesson l'écrit «Lire compulsivement affranchit du souci de cheminer dans la forêt de la méditation à la recherche des clairières. Volume après volume, on se contente de reconnaître la formulation des pensées dont on mûrissait l'intuition. La lecture se réduit à la découverte de l'expression d'idées qui flottaient en soi... ». 
Je crois que ce livre en est une nouvelle preuve pour moi. Il n'est qu'à voir les citations que j'ai pu relever parce qu'elles me parlent, formulent certaines de mes intuitions... 
J'aime son écriture et la recherche introspective du personnage, la recherche de ses limites et d'une forme de compréhension intérieure, d'acceptation, de rejet de l'inutile. J'aime la confrontation au temps et à la solitude. J'aime aussi son engagement et la force qui se cache derrière les faiblesses qu'il ne cherche pas à dissimuler face à la solitude, le manque... 
« Rien ne vaut la solitude. Pour être parfaitement heureux, il me manque quelqu'un à qui l'expliquer ». 
C'est le récit d'une expérience érémitique et d'une recherche que je rapproche de mes retraites cisterciennes, toutes proportions gardées et sans jugement de valeur évidemment.  
Je me retrouve en partie dans cet auteur et sa singularité que j'ai retrouvée aussi dans les quelques interviews de lui que j'ai pu voir. 
 
 
43. Où cours-tu ? N'oublie pas que le ciel est en toi – Christiane SINGER 
Avril 2020  
C'est drôle, début janvier j'écrivais ceci à propos de ce livre : 
Christiane Singer donne chair à mes intuitions, parvient à mettre des mots sur l'indicible que je perçois... 
Et quelques jours plus tard, dans le livre de S. Tesson (dans les forêts de Sibérie »), celui-ci écrit :  « La lecture se réduit à la découverte de l'expression d'idées qui flottaient en soi... ». 
Ce livre se lit aussi lentement parce qu'il est riche, comme ce que j'ai déjà lu du même auteur. Chaque phrase est un écho, donne à réfléchir, à ressentir, permet de se raviser... demande à intégrer. 
J'aime le langage imagé et métaphorique qu'elle utilise comme celle de l'ange du silence posant son doigt sur la bouche, interdisant l'accès à cette mémoire intérieure de l'être, cet inconscient, ce vers quoi le cheminement que je poursuis et l'hayahuasca m'a mené. Cette mémoire interdite constitue tout ce qui est éternellement en nous, indestructible, ce diamant incombustible qui subsiste lorsque tout le reste a brûlé. 
J'aime comme elle distingue la réalité et le monde manifesté, comme cela se rapproche de la science dans sa plus belle acception, la physique quantique en particulier... 
J'aime aussi ce retour lucide sur le « nous » qui se présente comme le seul choix possible face à ce désespoir, ces images du monde que l'on déverse en permanence sur nous et qui occultent tout le reste, l'essentiel, en brouillant le message vital. J'écrivais un petit texte le 17/1 à ce propos dans mon journal : « 17/1/2020 – s'extraire du leurre ». 
Quelques extraits : 
« J'ai beaucoup fait pour ce monde quand je suspends ma course pour dire merci » p15 
 
« Dans une description du monde ou seule la réalité objectivable, mesurable, chiffrable, analysable est prise en considération, le Réel - c'est-à-dire l'espace entre les choses et les êtres, la relation, le tissu de corrélations, l'insaisissable, le mouvant, le vide, l'obscur, l'invisible respiration qui tient ensemble l'univers- n'a pas sa chance. Décrété insignifiant et « subjectif », il est tout simplement radié. La face cachée du monde, celle même qui donne un support à la face visible, cessant d'être porteuse et inspirante, se peuple de démons. 
La rage de manipuler la vie, d'en extorquer le sacré, est celle de toutes les dictatures politiques du scientifique, et manifeste le dépit, l'arrogance des petits maîtres devant la folle, la généreuse, la sublime, l'inextricable complexité du Réel. Cette obsession impose au monde où nous vivons un ordre réductif et mortifère. 
Si nous abdiquons nos intuitions profondes qui lient notre existence à l'entière création - au Tout- nous aggravons le fondamentalisme régnant : le principe de la Raison est loin d'être un principe universel pour explorer le monde. Pour de multiples cultures, c'est la communion qui fait appréhender la création, et de l'intérieur cette fois, non de l'extérieur. Si le principio rationis ne tient pas dans nos vies la balance à la communio, l'homme finit par se trouver réduit à ses glandes et aux cours de la bourse. Le désespoir et sa sœur la maladie ne sont pas loin ! » p 28, 29 
 
«  Il n'y a pas de matière, il n'y a qu'un tissu de relations » (Niels Bohr) 
 
« Notre société ne parviendra pas plus à extirper l'amour de la création qu'à éteindre la voie lactée, mais elle réussira bel et bien à s'extirper elle-même. Ce qui est menacé, c'est notre participation au concert, pas le concert. C'est notre branche que nous scions, notre participation à la fête que nous compromettons. En réduisant le champ vibratoire de l'amour dans nos vies, c'est nous-mêmes que nous expulsons hors du domaine des Vivants. Le camp des morts et des zombies agrandit son périmètre. » p 50 
 
« L'avalanche de gadgets et de machines diaboliques que nous déversons sur eux avant qu'ils n'aient atteint l'âge de l'abstraction est une entreprise de destruction ; leurs yeux s'éteignent, deviennent carrés comme les écrans et pleins d'images mortes et mortifères » p61. 
 
« Personne n'exige de moi que je réussisse, mais seulement que je franchisse un pas en direction de la lumière. L'important n'est pas que je porte le flambeau jusqu'au bout, mais que je ne le laisse pas s'éteindre. » p 98 
 
« Refuser de mûrir, refuser de vieillir, c'est refuser de s'humaniser. L'humanisation passe par le relâchement du masque, par son amollissement. Refuser de mûrir, c'est en somme refuser de devenir humain. Nous nous transformons alors en ces concrétions pierreuses, en ces calculs qui bloquent no reins, qui bloquent le passage au flux de l'être, en ces statues liftées au seuil de la vieillesse » p 134 
 
« Nous avons à insuffler à notre monde la mémoire de ce divin dont il est, dont nous sommes. C'est bien là la raison de notre passage sur terre. Toute notre civilisation s'écroule, s'effondre si la vieillesse perd ce rôle de témoignage de l'immortalité » p 136 
 
« La question radicale, la question qui rend fou ne peut alors manquer de monter : Est-ce que je sais vraiment ce qui serait mieux ou préférable ? Est-ce que le pire sur terre n'a pas toujours été commis par ceux qui savaient ? « veillez à ne pas nous imposer un bonheur qui n'est pas le nôtre ! ». Sage prière d'un notable algérien au début de la colonisation ! Bernard Besret ose pour sa part une formulation plus radicale : «  Le mal c'est le bien qu'on veut imposer aux autres ». » p 148. 
 
 
44. L'amour pur – Agustina IZQUIERDO 
Décembre 2019 
 
Encore un livre que le « hasard » (toujours lui... qui n'existe que dans l'esprit des hommes) m'a mis entre les mains ; trouvé sur une étagère de Carmarans, et de toute évidence acheté par Christine à la librairie « Pont virgule » d'Espalion, où elle allait régulièrement. Je l'ai trouvé en novembre et fini de le lire hier le 14 décembre. J'écris maintenant ce résumé, le 15 décembre, date d'anniversaire de la mort de Christine. Les hasards se bousculent... 
Le titre du livre résume mieux que de longues phrases ce dont il est question. L'amour inconditionnel d'une femme, servante, Catarina Jonques pour un prêtre à l'apparence austère, le père Guimera, mais néanmoins sensible et conscient de la réalité que la religion (la conception qu'il en a) l'amène à refouler, refuser, rejeter jusqu'à en être odieux et méchant. 
Mais comme l'amour de cette femme, que rien n'arrête dans ses sentiments, est beau et respectable, pur, simplement pur parce que dénué de tout intérêt, de tout jugement... 
Voici une citation qui l'exprime : 
« à la vérité, son bonheur ne venait pas de ce qu'elle voyait, ni de l'odeur de fenouil et de pêches qui embaumaient ; il ne résultat de la quasi-réclusion où elle avait été tenue, depuis l'âge de seize ans, au service de la Señora Doña Ester ; il tenait au fait de vivre tout cela aux côtés du Père, d'être bercée par sa parole grave et bavarde, de partager sa promenade » p50 
Et une autre considération sur l'amour... des hommes : 
 
« à mon avis, les hommes ne veulent pas comprendre qu'ils aiment quand ils tombent amoureux. J'ai vu mourir mon père. Les hommes vont mourant comme des petits garçons qui gémissent dans leurs manies. Comme des petits garçons qui réclament toujours plus une mère qu'une femme, et qui terminent leurs jours en pleurnichant dans l'effroi devant la souffrance et dans l'épouvante devant la disparition » p124 
 
 
 
 
45. Rastenberg – Christiane SINGER 
Novembre 2019 
 
Le monastère où je me trouve en ce moment, l'abbaye d'Eyguebelle, ne fait pas tout, même si le lieu et ce qu'il transporte des destins passés, des prières et des méditations accumulées, comme des couches d'humus, y est certainement pour beaucoup. Christiane Singer apporte à tout ce qu'elle évoque, avec une délicatesse et une poésie singulières, une signification alternative qui prend le pas sur le réel factice qui nous entoure. Elle me fait toucher la réalité indicible que je pressens. 
Dans tout ce qu'elle écrit, elle met une poésie incroyable qui confirme que cette dernière est bien souvent l'image de la réalité et non pas, comme d'aucun peuvent le penser, celle d'un éther ou de songes échappant au monde concret. 
C. Singer nous emmène dans cette maison/château qu'elle occupe et nous fait découvrir, à travers son âme, l'âme qui existe en toute chose, la signification subtile de chaque pierre, chaque peinture, chaque frémissement ; les ondes qui nous entourent et vibrent en chacun de nos actes, chacune de nos pensées, chacune de nos connexions. Son écriture poétique nous amène à touche au plus près le lien qui existe entre tout ce qui est, quelle qu'en soit l'époque et quel qu'en soit l'éloignement temporel apparent. 
D'une maison froide et austère telle qu'elle la décrit dans son apparence concrète, elle nous en dessine un portrait enflammé parfois, violent et doux, rude et délicat, vivant en somme. Par là même, elle souligne ce qui se cache en tout derrière l'apparente réalité, la réalité subtile et accessible par ses sens subtils, au delà de la vue ou de l’ouïe. S'ouvrir et percevoir, vibrer en même temps que tout ce qui n'est en fait pas différent de nous-mêmes mais en est partie intégrante, dans un univers où tout est relié. « Tout est tout et rien n'est rien ». 
Il semble, à la lecture de Christiane Singer, que l'on se rapproche de la réalité impalpable de notre existence et de notre univers, loin des appâts et des leurres permanents, dans une symphonie merveilleuse digne d'un printemps permanent. 
La Vie est plus belle dans ce qu'elle nous amène à toucher. 
Et quelques citations de ce livre merveilleux encore. 
« Ceux qui n'ont pas aimé comme fous sont comptés pour morts ici » 
« Sans cesse l'immuable et l’éphémère se frôlent » 
« Et je sais grâce à toi qu'il n'y a rien à craindre puisque tout est et à la fois n'est pas ». 
« Sachant désormais que le monde que j'habite est le monde qui m'habite, je veille à la coloration de mes pensées comme à la prunelle de mes yeux. Et que faire de mieux en réalité que de m'appliquer à voir Dieu partout » 
« Et si la grande affaire de la vie ne consistait qu'à laisser chaque jour grandir le soupçon, ce que je défends, ce que je vois et ce que je crois n'est pas le Réel ? Si la grande affaire était de reconnaître que les Dieux auxquels je sacrifie sont des ombres et le priorités que je pose des fantasmagories ? Et que loin derrière les représentations et les croyances de mon époque s'esquissent les rives de l'Univers créé ? » 
 
 
46. En finir avec Eddy Bellegueule – Edouard LOUIS 
Novembre 2019 
C'est un récit de souffrance, de A à Z, sur toute la ligne, dans sa famille, à l'école, au collège, avec ses « copains ». Partout la violence, le mépris et les humiliations. C'est un récit prenant et qui fait presque fermer les yeux parfois tant les scènes sont crues. 
On se trouve au cœur d'une famille pauvre de la Picardie, pauvre dans tous les sens du terme. 
Quel caractère il a fallu à ce gars pour survivre d'abord et entamer un brillant parcours d'études et littéraire. Mais ces deux choses, au lieu d'être paradoxales, ces deux choses se présentent comme une relation de cause à effet. En pareille situation, ou tu meurs, ou tu vis et là, le parcours est souvent en rapport avec la souffrance et les difficultés vécues.  
Eddy Bellegueule est le vrai nom de l'auteur qui a pu en changer il y a 5 ans environ.  
Je me demande comment il est possible d'avoir des souvenirs aussi précis, des faits bien sûrs mais des mots aussi... Sauf que ces faits sont relatifs à tellement de violence, de souffrance... et de situations qui marquent de manière indélébile... 
Les faits restent gravés et pour les résumer, quoi de mieux que cette citation des premières lignes du livre :  « De mon enfance, je n'ai aucun souvenir heureux. Je ne veux pas dire jamais, durant ces années, je n'ai éprouvé de sentiment de bonheur ou de joie. Simplement la souffrance est totalitaire : tout ce qui n'entre pas dans son système, elle le fait disparaître ». 
 
 
47. N'oublie pas les chevaux écumants du passé – Christiane SINGER 
Octobre 2019 
Au départ, il y avait le titre...qui ne me parlait pas plus que ça. Acheté en 2012 ; j'entame ce livre le 15/10/19... Quel choc dès les premières pages ! Alors que je fais en parallèle ce travail de généalogie (je savais bien qu'il avait un sens !), il semble en être le parfait écho, un écho ou plutôt une réponse à mes interrogations de ces derniers temps, à mes aspirations, à ce sentiment de solitude « souviens-toi de ta noblesse » (St Augustin). 
Quoi de mieux pour résumer ce livre que d'en extraire quelques citations qui m'ont paru si fortes qu'elles diront certainement mieux que moi ce qu'il en est... (je ne reprends cependant pas ci-dessous l'ensemble (trop important) des citations que j'ai relevées dans ce petit bouquin. Elles se trouvent dans le document « citations »). 
Tout conspire à nous mettre en présence d'objets que nous pouvons tenir pour invariables...(Bergson – la pensée et le mouvant) p 26. Oui la matière, ce qui est visible, manifesté, est une conspiration en ce sens qu'elle nous ferait oublier le reste...l'essentiel. 
« A force de traiter les œuvres d'art comme de la matière et non comme des visions hissées jusqu'à la visibilité, on perd la trace de l'essentiel : le lieu où la vision a germé, a surgi, s'est déployée » p27 
«  il faut répéter sans se lasser que ce qui existe sur terre n'est qu'une ombre du possible, une option entre mille autres. Nous avons été invités à jouer au jeu des dieux, à créer du frémissement, de l'ample, du vibrant - et non à visser l'écrou de la coercition sociale et des soi-disants impératifs économiques. » p29 
« Notre inertie rend probable que le probable ait lieu – mais il n'est pas pour autant improbable que ce soit l'improbable qui surgisse. » p29 
« n'oublie pas les chevaux écumants du passé... leur message n'a pas de mots, pas de contenu, il ne se formule pas, n'a jamais été envoyé ni reçu, ni gravé sur un fronton. 
C'est un frémissement amoureux » p31 
Magnifique. Évident. Essentiel. C'est un hymne à la vie ! 
Il parle si bien de l'invisible, de l'insaisissable, de ce qui est mais ne se voit pas, de la vérité, de la réalité se situant dans tout ce que l'on ne peut justement jamais saisir. 
En ce sens, je perçois mieux encore la pertinence du fait que l'on passe sa vie à relever les voiles qui sont tombés après notre enfance, par l’éducation, le conformisme, les modes... Et donc que la deuxième partie de sa vie (j'y suis:-) ), dégagée des obligations de « survie » et autres, permet de se rapprocher de cet insaisissable. 
La perception, la réception de l'invisible. Le don de l'invisible du passé, manifesté par la foule de mes ancêtres. C'est aussi cela que je reçois dans ces recherches généalogiques ... 
C'est un livre que je ne peux lire que lentement ; à chaque fois que je lis quelques pages, il me faut quelques heures de pause pour l'intégrer, m'en remettre, l'assimiler, en partie. 
 
 
48. Pourquoi j'ai mangé mon père – Roy LEWIS 
Septembre 2019 
C'est un livre à la fois instructif et amusant, retraçant an accéléré une genèse de l'humanité dans l'évolution du pithécanthrope. Je parle d'une genèse de l'humanité parce qu'au delà de la problématique de cette ère, on y retrouve tous les profils humains actuels et ses archétypes, leurs dérives de même que les plus belles inventions de ce qui deviendra l'homme, avec ses perfections et ses perversions. Tous les progrès sont décrits avec humour, les découvertes fortuites ou dues à l'intelligence, des méthodes de chasse à la démocratie, de la problématique de la prolifération nucléaire, du pouvoir, des relations, de l'influence avec en corollaires l’appât du gain, l'échange, la spéculation, les profits. Chaque membre de la horde que l'on suit avec amusement incarne un profil type, de l'artiste à l'ingénieur en passant par l'altruiste, le revendicateur... Toute notre époque peut y être transposée, à l'image des microcosmes et des macrocosmes, avec des problématiques identiques sur des plans différents 
 
 
 
49. La vie devant soi – Romain GARY (Emile AJAR) 
19/9/2019 
Un livre abandonné sur la table d'un bistrot à Conques cet été. J'ai d'abord pensé qu'il avait été oublié... puis laissé là délibérément... Personne n'est venu le rechercher. Je suis donc reparti avec, curieux de savoir ce qu'il avait à me dire, ne serait-ce que par son titre enthousiasmant, qui plus dans cette période personnelle où les choses sont un peu difficiles. 
Il s'agit de l'histoire d'un enfant élevé par Mme Rosa, ancienne prostituée juive dont le métier et sacerdoce est devenu de recueillir des enfants de prostituées, abandonnés ou laissés pour « quelque temps ». Une vie truculente qui est surtout le prétexte à un regard exceptionnel sur la vie, les gens, les sentiments, les relations. Tout cela dans les yeux de Momo et avec son vocabulaire et ses expressions d'une naïveté tellement lucide, entouré de personnages clés et symbolique : Mme Rosa bien sûr mais aussi Monsieur Hamil, sage et philosophe déclinant, des « proxynètes » (M N'Da Amédée) et des prostituées (Mme Lola) généreux et d'une humanité qui tranche avec les cases dans lesquels on les range habituellement . 
Chaque phrase ou presque est une perle qui nous livre une vérité vraie, brute parfois, mais toujours ornée de poésie. Chacune de ces situations, de ces visions de la vie mériterait que l'on s'y arrête, qu'on la médite dans sa naïve et belle évidence. 
C'est évidemment un exploit littéraire et de style pour R. Gary de trouver la justesse dans ce langage sans qu'il soit le sien. Il y pénètre la pureté du monde revisitée par l'adulte grâce à la vision de l'enfant. Brut et sincère autant qu'honnête et indiscutable. 
On y découvre un modèle de bientraitance et de bienveillance dans les mots et les actes de Momo, si émouvant de justesse. 
L'amour à l'état brut. Brut l'amour, bruts les mots, sans ornements inutiles. 
Quelques extraits :  
« Les gens tiennent à la vie plus qu'à n'importe quoi, c'est même marrant quand on pense à toutes les belles choses qu'il y a dans le monde » 
« Mais je tiens tellement à être heureux, je préfère encore la vie » p 90 (folio) 
« J'en ai parlé à Monsieur Hamil, on pourrait le monter au sixième sur des brancards pour la proposition et puis les transporter tous les deux à la campagne et les laisser dans un champ jusqu'à ce qu'ils meurent » p 139 (folio) 
« Monsieur Hamil m'avait souvent dit que le temps vient lentement du désert avec ses caravanes de chameaux et qu'il n'était pas pressé car il transportait l'éternité » p 158 (folio) 
Momo s'adressant au Dr Katz qui veut envoyer Mme Rosa, mourante, à l'hôpital «  ... et ne me regardez pas comme ça, docteur Katz, parce que je ne vais pas faire une crise de violence, je ne suis pas psychiatrique, je ne suis pas héréditaire, je ne vais pas tuer ma pute de mère parce que c'est déjà fait, Dieu ait son cul, qui a fait beaucoup de bien sur cette terre, et je vous emmerde tous sauf Madame Rosa qui est la seule chose que j'ai aimée ici et je vais pas la laisser devenir champion du monde des légumes pour faire plaisir à la médecine, et quand j'écrirai les misérables je vais dire tout ce que je veux sans tuer personne parce que c'est la même chose et si vous n'étiez pas un vieux youpin sans cœur mais un vrai juif avec un vrai cœur à la place de l'organe vous feriez une bonne action et vous avorteriez Madame Rosa tout de suite pour la sauver de la vie qui lui a été foutue au cul par une père qu'on connaît même pas et qui n'a même pas de visage tellement il se cache et il n'est même pas permis de le représenter parce qu'il a toute une maffia pour l'empêcher de se faire prendre et c'est la criminalité, Madame Rosa, et la condamnation des sales cons de médecins pour refus d'assistance... » p 235 (folio) 
 
 
50. Ce pays que tu ne connais pas – François RUFFIN 
Août 2019 
Outre le fait que j'apprécie le travail de F.R. et que j'admire la force, l'honnêteté et l'absolu de son engagement, j'en aime aussi l'écriture. Car ce journaliste, député est un écrivain ; il possède une verve littéraire certaine qui donne une écriture vivante, entière et fluide correspondant bien à son personnage. 
Ce bouquin n'est pas un livre politique, polémique ou partisan, il sonne pour moi comme un rappel, un résumé de ce qui se passe depuis mai 2017, date de l'élection d'E. Macron... Tant de choses déjà « oubliées »... 
Il sonde dans ses profondeurs le mépris affiché d'une classe pour une autre, il met en perspectives les actions délibérées de ce président pour une classe, avec la promesse faite en échange des chèques de soutien, d'écraser l'autre, celle d'en bas, du peuple et des gilets jaunes. Il dénoue la trame des réseaux constitués pour sauvegarder le patrimoine des 26 qui possèdent plus à eux seuls que la moitié de la population, d'un système aussi bien rodé qu'odieux. 
Je me sens écrasé en constatant tout cela avec ce recul (petit certes, mais si nécessaire), écrasé par la puissance du bulldozer et j'en viens à plus d'admiration de cet engagement qui jamais ne renonce et défend « becs et ongles » la souffrance et l'injustice au quotidien. Je revois ce grand-écart d'un président si loin de tout sauf des siens, la manipulation permanente de la parole donnée et reprise, des mots pour amadouer, des mots pour écraser... et ce calcul permanent, ce fil rouge qui explique cette infamie, ce tissu de mensonges dans lequel il se complaît si bien qu'il en est imprégné au point de ne plus le voir ; comme celui qui vit dans la merde et ne la sens plus lui-même ! 
 
 
51. Vivre le deuil au jour le jour – Christophe FAURE 
Août 2019 
J'avais compris, en voyant le fil « et je choisis de vivre », en particulier lors de l'intervention de C. Fauré, que j'avais rejeté avec dogmatisme un ensemble de rituels liés au deuil et que je trouvais ou ridicules ou trop ancrés dans des traditions religieuses. J'avais tort car ils font partie intégrante de ce processus complexe que C. Fauré décrit et analyse avec précision dans ce livre en démontant tout ce qui en fait les pièges, les difficultés, les effets pour l'intéressé et son entourage. 
J'ai ainsi mieux compris et surtout considéré comme « normal » ce que j'ai pu vivre en terme d'envie de relations puis d'envie de solitude... d'abandons et de désertions multiples des amis qu'on croyait ! 
J'ai pris conscience de la complexité et de l'importance de chaque étape dont on ne doit pas brouiller ni négliger l'ordre et la complétude... 
J'ai pu mettre ainsi en perspective ce que j'ai vécu lors des deuils de Christophe, Thierry, Maman, Christine et constater à quel points certaines étapes ont été avortées (encore !). Mais ce livre m'a aussi permis de mettre une « normalité » sur ce qui me paraissait à moi-même comme anormal, atypique, que ce soit dans la durée de certains deuils comme dans les effets sur les relations aux autres, le fait d'avoir tantôt besoin d'être seul et tantôt se sentir seul ! 
J'ai mis le doigt sur nombres d'aspects que j’ignorais ou dont je jugeait mal l'importance. Il en reste à faire un travail complémentaire et les aspects pragmatiques du livre le permettent au travers de questions précises à se poser pour mailler et mieux cerner le point où l'on en est. 
 
Comme pour « maintenant ou jamais », il s'agit d'un très beau livre, témoignant de la connaissance de ce processus et du travail immense réalisé par l'auteur au cours de son expérience de thérapeute. 
 
 
52. Maintenant ou jamais – Christophe FAURE 
Juin 2019 
J'avais eu l'occasion de voir quelques chroniques de ce psychiatres dans une émission télévisée et j'avais été touché par sa voix autant que par la sensibilité de ce qu'il développait. Je l'ai revu comme intervenant dans le film-documentaire de Nans Thomassey « et je choisis de vivre » et j'ai à nouveau été très touché par ce qu'il disait au sujet du deuil dans ce film exceptionnel sur la Vie, la Vie après la mort d'un proche... 
Il a beaucoup écrit en particulier sur ce qu'est le deuil, ce qu'il représente et par quoi il doit ou peut passer. J'ai eu à cette occasion la possibilité de mesurer à quel point j'avais pu manqué certains rendez-vous après le décès de Christine. Rendez-vous manqués par dogme, parce que je refusais en particulier ce qui pouvait se rattacher à des rituels, des objets conservés, des mémoires trop systématiquement rappelées etc... Je me disais que l'on avait pas besoin de cela... 
Mais là n'est pas le sujet du livre, seulement le point d'entrée.  
J'ai, immédiatement après le film, acheté deux de ses livres dont celui-ci qui m'a interpelé par le thème qu'il abordait : le milieu de vie. 
Et je n'ai pas eu à le regretter... C'est un livre qui se lit facilement, sans lourdeur mais qui, pour moi, nécessite une lecture lente pour en digérer la teneur d'une densité bien supérieure à celle de la masse des mots... 
Même si je suis plutôt dans la fin de cette période que l'on peut situer entre 40 et 50 ans, j'en ai tiré de nombreux enseignement et une grande matière à réflexion. J'ai pu revoir les choix qui se sont présentés à moi et les considérer en l'absence de jugement, de comparaison ou de référence convenue, ce que je ne faisais pas, parce que j'en étais bien incapable, à l'époque où j'ai dû faire ces choix. Je m'en suis senti réconforté. Mais dans une période où aujourd'hui, je me pose de nombreuses questions encore sur le sens de la vie, sur le sens de ma vie, sur les objectifs et la tournure à lui donner, les pistes, les interrogations suggérées me sont d'un nouveau secours et me portent dans une dynamique d'élans porteurs de vie. 
Ce livre a en effet un côté très éclairant dans la description du processus d'individuation mais également un côté « rassurant » permettant de raccrocher ses doutes, comportements, errements parfois, à une forme de normalité. Il est illustré de nombreux cas individuels qui permettent de raccrocher davantage encore les enseignements à la réalité. 
Ce livre fait partie de ceux dont j'ai envie de ne rien oublier, qu'à peine terminé, j'ai besoin de relire pour mieux le comprendre et que j'ai hâte d'intégrer au mieux. En ce sens, c'est évidemment un livre que je ne vais pas ranger dans la bibliothèque mais que je vais interroger régulièrement, dont je vais relire des passages, dont je vais m'inspirer, dont je vais mettre en œuvre les questionnements suggérés... Tout sauf un livre « bibelot ». Un livre utile. 
Et c'est assez drôle, mais je ressens dans l'écriture de C. Fauré la même bienveillance que celle que l'on perçoit dans la tonalité de sa voix. 
 
 
53. Ceux de Verdun – Maurice GENEVOIX 
Avril 2019 
J'ai trouvé ce bouquin dans la bibliothèque de Carmarans, venant d'Angelo qui se passionnait pour cette guerre de 14-18. Rien à voir avec les vues, fussent-elles les plus justes, des historiens ou auteurs divers. C'est la guerre vue de l'intérieur avec une acuité et une lucidité extraordinaires alliées à une poésie présente en toile de fond. Car la rudesse, les horreurs, les manques, de sommeil, de nourriture... font apparaître le moindre bienfait comme une bénédiction : une nuit de sommeil dans un lit, se déchausser, se laver, savourer un plat, contempler le ciel ou des arbres, écouter des animaux. Toute chose qui nous paraît si normale au quotidien est en fait un trésor que les conditions de guerre révèlent. 
Comme les décès, comme les épreuves, ce livre est une piqûre de rappel ; au delà de la souffrance et des conditions inhumaines, un fil rouge de conscience permanent nous guide vers l'essence de la vie, et tous les plaisirs simples, quotidiens et futiles autant qu'essentiels. 
L'écriture est limpide et riche à la fois ; elle s'attache tant à la description factuelle de chaque journée qu'à ce qui se passe dans l'esprit de l'auteur et de ce qu'il suppose dans celui de ses troupes. 
Par ses mots, Maurice Genevoix nous mène au cœur des tranchées, parmi les chemins meusiens. On partage ses peurs, le mystère et la terreur qu'inspirent les bois noirs, on ressent la violence de combats, celle des détonations incessantes, la cruauté, la froidure de la pluie glaciale qui s’immisce partout, le bruit assourdissant, les rumeurs et les odeurs des tranchées, tantôt subtiles quand les yeux s 'éloignent, tantôt nauséabondes. 
S'y mêlent aussi l'ennui et l'exaspération toujours contrôlée, la résignation qui bascule parfois vers l'indifférence à son propre corps, à son propre destin, quand la fatigue et la souffrance dépassent tout, au delà de tout. 
Chaque parcelle de glaise, chaque souffle des explosions, chaque larme quand l'un meurt, chaque chagrin, chaque souvenir est vécu à travers son écriture vive, vivante. 
« Encore un soir, après un jour honnêtement vécu. Puisque j'ai été, tout ce jour, celui que j'ai résolu d'être... puisque personne, parmi ceux qui m'entourent, ne songe à moi, ce soir, pour m'en vouloir d'un mal que je lui aurais fait... » 
 
« bon ! Dit Pannechon, v'là aut'e chose à présent. J'suis gelé, j'ai mal partout : j'ai envie d'me laisser crever... La vérité, mon lieutenant, j'vous jure. C'est trop d'maux pour les mêmes, aussi ! Quante c'est pus les balles, c'est la boue, c'est la flotte, c'est l'manque de dormir ou d'manger, toujours du mal : ça fatigue à force, vous savez . Moi j'suis au bout, j'ai pus d'courage. » 
 
Ce livre résonne pour moi comme si j'étais partie prenante de ces combats, de cette guerre dont l'absurdité est révélée par les dizaines de milliers de morts sacrifiés pour un lambeau de colline, sacrifiés par ceux que je qualifiais de maître-bouchers dans un texte inspiré un jour de mai (le 7/5/2015) dans les forêts de Verdun encore habitées par les âmes de ceux qui ont perdu leur existence au nom de l'orgueil des généralissimes aux ventres arrogants : 
«  Ce jour là, je ne sais pourquoi... 
Il le fallait. 
J'ai mis mes pas dans les vôtres. Ce serpent creusé par vos vies, hanté par vos bras orphelins, peuplé par vos voix étouffées, m'a souri au soleil printanier de mai naissant. 
Quelques décennies encore, et l'humus fera oublier vos folies ou celle de vos maîtres bouchers. 
J'ai mis mes pas dans les vôtres pour sentir votre essence bien présente, entendre vos cris, de colère étouffée (avortée), d'agonie esseulée. J'ai marché sur vos ventres gonflés par la boue et creusés par la faim. 
J'ai remplacé un siècle après, le vermine qui courait sur vos corps. 
Je n'ai pas oublié. 
Je n'ai rien oublié. J'y étais avec vous. Vous êtes moi qui encore parcours ce chemin tortueux comme vos âmes, que le temps engloutis, comme vos âmes. 
Le temps prend son temps. Le temps a le temps. 
Lentement. Haletant. 
Patiemment, il répare, gomme, efface, pardonne, 
l'irréparable, l'indélébile, l'indicible. 
Il cicatrise les blessures infligées à la terre, fait renaître chaque âme au pied d'un charme gris. 
Fait germer par milliers les hêtres aux feuilles transparentes comme vos vies. 
Le sol est gris encore, noirci par la fumée, la poudre et lavé par vos pleurs. 
Mais aujourd'hui, riez de me voir caresser 
vos desseins singuliers, vos morts inutiles, 
vos destins imbéciles.» 
Quelque chose d'aussi puissant qu'indescriptible me lie à eux. J'y étais. 
 
 
54. Vie intime d'un homme du fer – Joseph SALVADOR 
Janvier 2019 
Un livre que j'ai retrouvé par hasard, comme souvent, dans la bibliothèque. Acheté lors d'une exposition des léz'arts d'automne... Récit simple et sans prétention d'un mineur de Trieux, d'origine italienne. Sa vie, de travail, de fils d'immigré, de fils, de père... Des souvenirs, des réflexions... Ce petit livre est intéressant par la fierté et les valeurs qui s'en dégagent, un respect, excessif parfois, de l'ordre des choses tout en voulant les déranger. Une acceptation, une fierté de la progression sociale et intellectuelle, la volonté de raconter, laisser une trace peut-être, rendre plus « utile » une vie par un écrit... Derrière ça, une lucidité et une vision de ce monde qui, quoique simpliste, est loin d'être absurde ; on sent un vent possible de révolte derrière cet homme assagi par la vie. On sent, derrière le besoin, la fierté sans arrogance, d'être parvenu à faire des études, enseigner aussi et devenir un auteur. Parfois parsemé de passages un peu lourds, ce livre est attachant.  
 
 
55. Les bougnats de l'Aubrac – Daniel CROZES 
Juin 2019 
Un livre très, très documenté et agréable à lire que cette épopée des bougnats à Paris... Les charbons, débits de boissons ouverts tôt et fermés tard. La force de travail de ces femmes et ces hommes déracinés pour fuir la misère de l'Aubrac, de Ste Geneviève sur Argence, de Laguiole, d'Espalion ou d'ailleurs... L'abnégation, les enfants élevés par la famille au pays et qui ne voient plus leur parents pendant plusieurs années... Tous n'ont pas fait fortune ! On y retrouve aussi ce qui a fait la force et la réussite de ces implantations : les réseaux, les amicales, les cooptations, les financements internes, l'organisation, al préférence régionale … 
 
 
56. La bête humaine –Émile ZOLA 
Janvier 2019 
Zola magnifique par sa façon de peindre une époque dans tout ce qu'elle comporte. Des tréfonds des quartiers parisiens aux tréfonds de l'âme en passant par ceux d'un métier, du rail et des cheminots. J'avais toujours pensé que la bête faisait référence à cette locomotive, la Lison. Mais le parallèle est tiré entre sa mécanique, ses rouages, sa puissance et sa fragilité, son invincibilité, sa délicatesse et celle de l’homme qui la conduit, Jacques, de ceux qui l'entourent, Séverine, Roubaud, Flore et les Misard... Ce sont les rouages de l'âme humaine que Zola se plaît à explorer, ses faiblesses et inflexions sur fond d'un environnement magnifique, magnifié. Ce début de siècle est si proche de nous et pourtant si loin déjà, dans ses habitudes, autant que dans ses mœurs. Les méandres de l'âme humaine sont décidément la passion dévorante et récurrente de Zola, les explorant d'une extrême à l'autre, dévoilant à quel point l'on peut facilement passer de la tendresse, la fragilité et la sensibilité _ celle de Séverine par exemple_ au calcul infernal voire au machiavélisme et à la bête qui finalement, sommeille en chacun d'entre nous. Ce que révélait aussi Dostoïevski dans ses peintures qui présentent pas mal de similitudes avec celles de Zola. 
Et comment passe-t-on de l'un à l'autre, si facilement, si subitement... Grâce aux travers de ce qui fait et de ce qui pourrit une société, l'argent et derrière elle, l'avarice et l’aveuglement, le vice et le calcul, avilissant, détournant, corrompant les âmes mauvaises comme les plus belles dans les plus grands desseins et les plus beaux et sincères engagements. 
On est saisi par la froideur apparente des personnages vis à vis du poids de la Vie eu égard aux sentiments et aux passions ; la Vie n'étant plus alors que quelque chose dont on joue, que l'on donne ou que l'on prend par intérêt ou par passion, sans état d'âme ! 
Sans cesse, Zola explore ces oppositions des comportements, des pensées et des sentiments, d'un extrême à son contraire, du plus beau au plus exécrable. Dans chaque épisode des Rougon-Macquart, il reprend les ingrédient essentiels qui font la vie humaine : les conditions sociales, l'amour, la haine, l'argent, la mort et la perversion... 
 
 
 
57. Va où l'humanité te porte – Raphaël Pitti 
Septembre 2018 
L'engagement d'un homme qui ne refuse pas son destin, celui qui s'impose à lui parce que c'est le sens de sa vie, celle d'un engagement qu'on ne peut que trouver exceptionnel, le menant de son pays natal en Algérie à travers le monde dans de nombreuses zones de conflit. On perçoit régulièrement l'intransigeance absolue vis à vis de lui et des autres, une forme d'autorité, certainement nécessaire mais qui peut être dérangeante. Ce qui n'enlève en rien le niveau d'abnégation qui a guidé ses choix et surtout les résultats qui en ressortent, des centres de formation aux médecines d'urgence aux centres d'hébergement et d'accueil des migrants en passant par les vies sauvées souvent au péril de la sienne. Derrière la façade droite et parfois rigide que l'on perçoit, on ne peut se tromper sur ce qui guide l'ensemble de ses actes quotidiens : l'humanité en tout, la reconnaissance en l'autre de son égal. 
Je m'attendais à un livre sur son intervention au milieu de la guerre syrienne mais il est plus largement un récit de sa vie entière, même s'il débute par son action en Syrie et sa dénonciation des crimes qui y sont commis par la régime de Assad avec l'aide directe de la Russie et indirecte de toutes les pays occidentaux. 
En résumé un livre captivant et révélant des choses que l'on sait mais que l'on se plaît tellement à ignorer ; plus présentes encore lorsque celles qu'il relate se passent à quelques kilomètres de mon domicile, à Metz...  
Un livre qui interpelle et interroge sur notre vie, son sens, notre position et notre capacité d'action ou d'inaction... 
 
 
58. Et toute ma sympathie – Françoise SAGAN 
Août_septembre 2018 
Ce livre est un voyage accompagné. Des considérations, des sujets hétéroclites dont on ressort néanmoins une logique et une cohérence. Celle d'une promenade, main dans la main, dans la vie de l'auteur nous emmenant au gré de ses enthousiasmes, de ses amours, ses coups de cœur, tous domaines confondus, de ses rencontres et amitiés à l'admiration pour un homme politique ou l'amour des chevaux. L'écriture de F. Sagan est d'une précision et d'un style incomparables en même temps qu'une force évocatrice collant parfaitement à chaque sujet qu'elle aborde. 
 
 
59. Le monde d'hier – Stefan ZWEIG 
Juin 2018_ 
J'apprécie la liseuse me permettant de consulter la définition de termes de français que je ne connais pas. L'écriture de S. Sweig est tellement précise et riche que c'est assez fréquemment nécessaire... 
Ce livre est la visite d'une vie dans le sens aussi large que l'on puisse l'apprécier : celle à proprement parler de la vie de l'auteur, son milieu familial, le milieu dans lequel il évolue à Vienne, l'Autriche, son éducation, sa personnalité, ses rencontres, son initiation à la vie artistique et celle de la société européenne de l'époque à travers des voyages et des rencontres incroyables guidés par une curiosité insatiable, une avidité, une frénésie dans l'accumulation de tout ce qui est impalpable mais fait la richesse d'une vie. 
En ce sens, il s'agit à la fois d'un livre humain, social et d'un livre d'histoire, vécue de l'intérieur. Celle d'un juif pris par l'exil, la fuite et la guerre, se retournant vers un passé où je craignais parfois de voir une nostalgie omniprésente mais qui est mesurée par un réalisme et une lucidité permanents. 
Ce qui frappe, c'est la précision de ce tableau, celle des caractères, des personnalités des personnages qu'il rencontre, qu'il cherche (les poètes Verhaeren, Rilke, Rodin lorsqu'il retouche une sculpture en cours passant dans un autre monde...) autant que celle des lieux avec une description sensible autant que précise des villes qu'il visite (Paris, Londres, Berlin...) dont il s’imprègne avec un sens du voyage lié à la découverte de l'intérieur. Ce qui frappe aussi c'est cette façon de dépeindre le passé avec une précision étonnante en regard de ce que sélectionne une mémoire. 
S. Sweig est un observateur de l'intérieur exceptionnel, d'une sensibilité et d'une acuité folles. Chaque rencontre, voyage est l'occasion d'une « analyse » de la situation, baignée d'une réflexion philosophique en regard de la condition humaine et des contextes rencontrés. 
Il avait tout vu avant l'heure : l'état et la condition de l'homme s'améliorant, l’Europe, l'union européenne qu'il invoque... mais il reste dans un monde plutôt bourgeois et citadin. Je ne le vois pas beaucoup côtoyer les ouvriers, paysans lorsqu'il décrit ladite condition des hommes partant en vacances, faisant du ski etc... avant 1914 ! 
Cet ouvrage est un véritable livre d'histoire vivant, où transparaissent les peurs et les craintes du siècles, la haine de l'autre développée par la désinformation et l'ignorance... 
S. Sweig y décrit la première guerre mondiale et ses bouchers pour lesquels seule importe la gloire et l'orgueil en faisant fi des millions de vies humaines ; la stupidité, l'avidité des politiques, bien loin du front. La volonté d'une Europe unie, rêvée, souhaitée par les artistes comme lui et jamais faite par les politiques. 
Il y pointe pas à pas les stigmates laissées cette guerre, rancœurs et humiliations qui feront le terreux du national socialisme et conduiront à la reconstitution de haines plus fortes et l’apparition opportuniste du monstre, de la peste, brune. On y comprend comment on conditionne les populations, comment on amène l’innommable, comment il finit par s'imposer quand chacun s'attache à penser que « ça ne peut pas durer », que c'est impossible, un simple passage... 
 
L'occasion aussi pour moi de découvrir, un peu, Rilke : 
Es-tu si lasse ? Je veux te mener doucement 
hors de ce tumulte, qui depuis longtemps me pèse aussi. 
Notre blessure est à vif sous le joug de ce temps. 
Vois, derrière la forêt où nous marchons en tremblant, 
comme un château illuminé déjà le soir attend. 
Viens avec moi. Le matin ne le saura jamais, 
et dans la maison nulle lampe n’épiera ta beauté … 
Ton parfum imprègne comme un printemps les oreillers : 
le jour a mis tous mes rêves en pièces, – 
tresses-en une couronne. 
(Munich, février 1897) 
** 
Eteins mes yeux – je peux te voir, 
bouche mes oreilles – je peux t’entendre 
et sans pieds, je peux aller vers toi ; 
et sans bouche, je peux te supplier encore. 
Arrache mes bras, je te prends 
dans mon cœur comme dans une main, 
tiens mon cœur fermé, – mon cerveau battra, 
et si tu mets dans mon cerveau le feu, 
je te porterai dans mon sang. 
(Westerwede, septembre 1901) 
** 
Chanson d’amour 
Comment tenir mon âme, de sorte 
qu’elle ne touche pas la tienne ? Comment 
la tendre haut par-dessus toi vers d’autres choses ? 
Je voudrais tant l’héberger quelque part, auprès 
d’une chose perdue dans l’ombre, 
en un lieu étranger, tranquille, qui 
ne continue pas à vibrer quand vibrent tes graves. 
Mais tout ce qui nous effleure, toi et moi, 
nous unit comme un archet qui tire 
de deux cordes une seule voix. 
Sur quel instrument sommes-nous tendus ? 
Et quel musicien nous tient-il dans sa main ? 
Ô douce chanson. 
(Capri, mars 1907) 
 
 
60. Le miracle Spinoza – Frédéric LENOIR 
25/6/2018 
Le livre tient pour moi la promesse que porte son titre ! Oh oui ! Ô combien ! Découvert par la conférence que F. Lenoir a tenu sur ce thème en Suisse, je me suis senti happé et j'ai commandé de suite le livre. Commencé avant de venir au Pérou, je l'ai terminé à Iquitos, dans la forêt amazonienne, en ayant traversé d'intenses moments de bonheur et de jubilation pour la double raison suivante : 
d'abord j'ai réalisé dans nombre des idées, principes qu'il énonçait, à quel point Spinoza rentrait en résonance avec ma vision moniste des choses, la négation de la dualité en tout, l'universalité et le rôle central de l'Amour (même si pour Spinoza, l'amour est un mode de la joie, affect fondamental) 
- Spinoza m'éclaire de nouvelles explications si pertinentes à mes yeux quant aux affects fondamentaux : joie / tristesse / désir ; auxquels il faudra ajouter la raison pour s'exprimer et grandir. « grandir encore » : résonance à nouveau... Éclairages, lumières certes mais aussi et surtout ouvertures larges, puissantes, vives vers la durabilité, la pérennité, la longévité, l'éternité. 
Tant de l'amour que de l'ouverture joyeuse à la Vie 
Ce livre m'inspire tant que j'en ai recopié de nombreux extraits, citations, tant de Spinoza que de F. Lenoir. 
Synthétisées en idées, en schémas, elles m'ont déjà permis de mieux sentir le grand fonctionnement humain et universel, les deux à la fois (le même, en fait) ; la logique qui prévaut et sous-tend l'univers. 
J'en ai relu une dizaine de chapitres en découvrant d'autres lumières à chaque fois, m'imprégnant davantage à chaque fois de sa philosophie de la Vie, de sa Joie et de son éthique. 
 
61. La vie secrète des arbres – Peter WOHLLEBEN 
Mars 2018 
C'est une passionnante promenade en forêt pour découvrir la vie sensible et complexe des arbres derrière l'apparente immobilité de leurs troncs. Une vie de sensations, de communications, de combat et d'entraide. 
Car cette immobilité est bien apparente, elle n'est qu'une perception faussée du mouvement à l'échelle du temps des arbres (5 siècles) rapportée à l'échelle de temps humaine. 
Après une telle lecture, on ne peut plus se balader en forêt de la même façon, sans regarder, écouter, parler à nos frères... 
Ce récit me ramène à l'unité de ce qui nous entoure, du microcosme au macrocosme, il y a unité parfaite et seuls les esprits bornés imaginent encore des formes de différence, pire, de supériorité... Ce point de vue force le respect et ne donne d'autre alternative que de respecter la Vie, toute forme de vie. 
 
 
 
62. Les Onze – Pierre MICHON 
21/1/2018 
Petit livre mais que j'ai eu un peu de mal à terminer. Il y est question d'un tableau du peintre Corentin, exposé au Louvre, et représentant les onze révolutionnaires autour de Robespierre. Une cène révolutionnaire. Qui en fait est totalement inventée et n'existe pas plus au Louvre qu'ailleurs. 
Le livre est compliqué. On se laisse entraîner par les mots et une histoire. Des mots dont je n'ai pas tout compris. Des phrases insaisissables parfois, complexes, des références obscures... Le contenu n'est pas simple et l'écriture non plus. Elle est en tout cas atypique. Je ne connaissais pas P Michon, et j'ai eu envie de lire ces livres (j'ai aussi « vies minuscules ») suite à un épisode de la Grande Librairie où chacun portait aux nues cet auteur et cette œuvre littéraire. J'avoue être plus perplexe et me demander si ce ne serait pas du snobisme de considérer cela comme un chef d’œuvre. En tout cas, je n'ai pas trouvé l’œuvre très abordable même si je sens au fond une richesse peu commune. 
 
 
63. Cocktail Molotov – Zilber KAREVSKI 
15/10/17 
Petit recueil de nouvelles où l'écriture vivante, séduisante de ZK opère à nouveau. Elles sont bien ficelées, avec, comme il se doit, des chutes improbables. Très sympa à lire. L'ensemble comporte comme beaucoup de ses ouvrages (tous?) un accent lorrain prononcé. 
 
 
64. Le ventre de Paris –Émile ZOLA 
1/11/17 
Comme la série complète des Rougon-Macquart j'imagine, en tout cas comme ceux que j'ai déjà pu lire, Zola excelle dans le genre mêlant une histoire vivante liée à la condition du peuple, aux luttes politiques, dans une description fabuleuse d'un milieu particulier, en l'occurrence celui des Halles de paris, des commerces. Il saisit avec une précision inouïe les caractères des personnages, illustrant ce qu'il y a de meilleur et de pire dans l'humanité. 
Au centre, un héros toujours, que l'on suit passionnément ; ici Florent, venu du bagne et y retournant à la fin du livre, ayant au passage élaboré un plan révolutionnaire pour mettre fin au régime de Napoléon III.  
La description des halles, de son fonctionnement, de ses personnages, ses odeurs, son atmosphère est d'une précision telle que tous nos sens sont sollicités, quelquefois de manière un peu excessive dans le foisonnement. 
 
 
65. Bonjour minuit – Jean RHYS 
29/9/2 
C'est un livre émouvant, surprenant, atypique, singulier tant par l'écriture de l'auteur que par le thème et la façon dont il est abordé. Des scènes de vie, d'amour, de désespoir comme directement perçues dans le cerveau de la romancière, foisonnant, déroutant, surprenant le lecteur au même moment que le personnage, l'entraînant dans un mouvement incessant et un flot dont la confusion apparente cache parfaitement toute la cohérence de la vie. Une vie brute, cash, sans concession que l'on vit dans l'intimité du personnage. Un style unique et terriblement vivant. 
J'ai découvert ce roman dans un numéro de la grande librairie, présenté par F Ardant qui en a réalisé la préface, que je n'ai pas voulu lire avant le roman lui-même. 
 
 
66. Prendre soin de l'âme – Myriam BEAUGENDRE  
20/9/2017 
Myriam Beaugendre aborde un domaine fabuleusement intéressant en alliant la psychothérapie aux médecines chamanique à travers l'absorption d'Hayahusca, permettant d’accéder par transe aux parties inaccessibles de notre inconscient et par là même, de traiter les traumatismes les plus enfouis et les plus anciens. On y découvre la méthode et les témoignages nombreux étayant chaque aspect de cette médecine. J'y ai retrouvé de manière concise les nombreux éléments convergents que j'ai découverts au fur et à mesure du chemin sur lequel j'avance. En ce sens, je sens que cette lecture s'inscrivait comme la conclusion d'une étape et une proposition pour en synthétiser, en incarner les composantes. 
 
 
67. La chambre des époux – Eric REINHARDT 
Septembre 2017 
Mon premier contact avec ce livre, que je partageai dans l'enthousiasme, fut celui-ci « Ce matin , je m'arrête devant la librairie "Le Pont virgule", à Espalion , une vraie librairie ! je tombe nez à nez avec ce livre. J'avais été touché, bousculé et emballé par son roman précédent : "l'amour et les forêts". Sans rien savoir de ce dernier opus , je l'ai donc acheté. Ce soir je lis la quatrième de couverture et je comprends pourquoi je l'ai acheté... je souris. Je ne suis pas musicien.... ». 
La lecture fut tout autre. Non pas un supplice (parce que je tenais à le finir) mais une déception lourde. Je conviens tout de même que bizarrement, malgré de désintérêt total que relate l'avis qui suit, je le reprenais chaque jour sans déplaisir total. Certainement était-ce dû autant à la curiosité qu'à l'espoir d'y trouver enfin peut-être quelque chose de bien. 
Il y a effectivement quelques très jolis passages, une trentaine de pages en tout, relatives au roman qu'il aurait pu écrire (ça fait partie de l'histoire) ; mais 30 pages, ça ne fait pas un livre. On ne retrouve que dans ces extraits le style vif et harmonieux d'E.R., le reste comprend souvent des phrases alambiquées et dissonantes.  
L'ensemble paraît incohérent, du remplissage, des doublons et répétitions volontaires qui se voudraient un style mais qui est lourd. 
On connaissait les allitérations poétiques, E.R. A inventé les allitérations de pages complètes : 
Hors des belles pages, j'ai senti à chaque mot la lourdeur et la commande de l’éditeur de même que l'effort de l’écrivain. 
Même quelques très belles phrases sonnent faux , s'intègrent mal ou pas au récit. 
On a plutôt affaire à une juxtaposition de textes, sans cohérence autre que ce volume papier. 
 
 
68. Si c'est un homme – Primo LEVI 
21/4/2017 
Primo Levi écrit en tant que témoin, lui accordant ainsi le décalage suffisant pour nous faire pénétrer au plus près l'horreur de la vie infligée à ces femmes et à ces hommes, la déshumanisation par l'humiliation permanente, la réduction à l'état de chose. 
On pénètre, on ressent les douleurs, le froid, la faim dans chaque instant vécu, avec ce décalage qui paradoxalement nous donne avec l'auteur une proximité plus intense. 
Je me suis retrouvé transi, au travers des mots décrivant le dérisoire ridicule de leurs pauvres « vêtements » face à la rigueur de l'hiver polonais. Je sentais les odeurs de moisissure ou d'excrément, de chien... 
Il nous est cependant donné de voir cette partie intouchable de notre être, au delà du corps, qui permet de survivre, cette force initiale, invisible et intarissable. 
Celle qui permet de goutter le bonheur d' « attendre », rien, sans rien demander à son corps, comme un luxe inouï.  
Les valeurs essentielles ressurgissent, pas seulement celles du corps qui doit boire et manger, au même titre que les horreurs qui ne sont pas forcément que celles infligées au corps. 
Il nous est donné de voir l'homme face à ses atavisme, ramené à un état reptilien, mais aussi la force de la poésie face à cet atavisme ! 
Primo Lévi parvient, par la position distante qu'il prend, dans son récit, avec ses bourreaux et ce qui l'entoure, à donner une force inouïe à son témoignage, terme qui prend alors toute sa valeur. 
Il pénètre aussi l'âme humaine, en décrypte certains fonctionnements profonds, intimes, sans jamais juger ; parce qu'il a vu, vécu. 
De quel droit alors a-t-on jugé les kapos et toute personne de cette engeance...? Quand tout survivant aurait pu l'être, puisqu'il faisait partis des élus (car survivant et ayant fait ce qu'il fallait pour...) et non des damnés. Même si on ne considère alors que le cadre de cette incarnation. 
Ce sont des épreuves face auxquelles personne ne peut se prétendre d'une quelconque vérité... et à ce titre, d'en juger. 
 
 
69. Les cinq personnes que j'ai rencontrées là-haut – Mitch ALBOM 
12/2/2017  
Un nouveau livre qui, comme j'aime à le dire, m'est tombé sur la tête... Je l'ai retrouvé il y a quelques jours dans la bibliothèque ; jamais vu, jamais entendu parlé, mais ça me parle quand même. Le titre bien sûr et la couverture, un tableau de Magritte « la reconnaissance infinie ». 
 
Revisitée après sa mort au travers des rencontres décisives qu'il a faites, sans s'en rendre compte souvent, durant son existence, l'écrivain nous livre les explications de la vie d'une personne relativement anodine, les éclairages nécessaires à sa compréhension dans ce qui est l'ordre du destin, des destins croisés, de l'unicité de l'univers et de son interconnexion, et ce qui va de pair, l'absence de hasard. 
Un récit à la fois émouvant, prenant et intéressant, transcrit par des aller-retour entre des périodes importantes de sa vie, ses anniversaires également et une vision poétique des rencontres que l'on ferait après sa mort, des circonstances dans lesquelles elles se produisent et des leçons que l'on en tire. 
 
 
70. La voie du cœur – Arnaud DESJARDINS  
Fin août 2017 
Quel livre à la fois passionnant et un peu difficile d'accès, tant il renverse de croyances, retourne, brusque et dérange... A moi, il m'a fait beaucoup de bien, accompagnant, complétant tout ce que j'avais perçu, senti, pressenti sans ni le comprendre complètement parfois, sans l'incarner ou savoir comment le concrétiser.  
J'ai grâce à ce livre pleinement perçu la puissance des éléments constituant notre inconscient, de ce qui nous construit et des peurs ou traumatismes sur lesquels nos comportements se calent. J'ai également saisi, me semble-t-il, plus pleinement la non-dualité, la force de cohérence de ce qui nous entoure et dont je fais intégralement partie, la puissance de Vie omniprésente en même temps que la valeur universelle de cette dernière. 
Il a été très éclairant vis à vis de nombre de concepts tels que ceux qui sont issus de la Bible ou des religions en général, en y donnant une valeur et une signification qui me semble sinon exacte du moins proche d'une réalité possible. Prenons deux exemples : 
p131 - «...Le chemin qui vous est proposé n'exige pas de se mutiler, de se torturer et de faire des sacrifices déchirants. Il vous demande au contraire de vous ouvrir, d'admettre, de reconnaître de plus en plus... » 
p 77/78 : Une des paroles les plus intéressantes du Christ à cet égard, c'est d'avoir affirmé nettement que. L'homme n'est pas fait pour le Sabbat, c'est le Sabbat qui est fait pour l'homme. Le Sabbat, vous le savez, c'est le repos du septième jour pendant lequel un juif pieux ne doit accomplir aucun travail. Et le Christ s'est permis d'accomplir un certain nombre d'actions le jour du Sabbat, ce qui a fait scandale...Cela ne doit jamais être oublié. La loi, même considérée comme une loi divine, n'est pas faite pour asservir les hommes mais pour aider les hommes à se libérer. La loi juste est toujours au service de l'homme... 
p 284 : »Dieu est à la fois plein d'amour et Tout-Puissant ». Cette parole parait révoltante .Ou Dieu n'est pas tout-puissant, alors pourquoi dire qu'il est, ou si il est tout-puissant comment ose-t-on dire qu'il est plein d'amour alors qu'il tolère les martyrs, les atrocités, les cruautés, les guerres, les camps de déportation, les persécutions, les tortures... entendez la ainsi : rien à pouvoir sur Dieu en vous, rien ! De même qu'aucun fil d'incendie n'a le moindre pouvoir de Roussir ne serait-ce qu'un coin de l'écran... « Retrouver Dieu en vous » _ ce que je cherche le Mystique_ ou retrouver votre propre soi au sens ultime de ce mot, c'est découvrir en vous cette conscience d'être sur laquelle Rien n'a prise et que vous pouvez aussi appeler esprit... 
 
Le style d'écriture d'A Desjardins est parfois difficile par les répétitions de certains concepts et la manière dont il semble insister mais je crois que compte-tenu de leur teneur, ces répétitions ne sont pas inutiles.  
J'ai mis des mois à le lire tant il est dense et intense. C'est probablement le livre que j'ai le plus annoté... 
 
 
71. Tarass Boulba – Nikolaï Vassilievitch GOGOL 
3/3/2017 
C'est le premier livre de N. Gogol que je lis. L'écriture me semble aussi grandiose que les paysages et les steppes dans lesquels elle se déroule. 
Elle est pourtant relativement sobre mais précise au point de voir clairement sous ses yeux , derrière les mots, toute la complexité d'une bataille, d'un siège, de manœuvres militaires... 
Parce qu'il est évidemment beaucoup question de guerre dans ce récit, celui de la vie d'un être pour lequel rien n'importe plus que de se battre, pour la gloire cosaque, pour la gloire de l'Ukraine, de la Russie et pour défendre l'église orthodoxe, ce prétexte valant tous les massacres, décapitations, viols, barbaries et sacrifices, y compris de ses fils. Tarass Boulba, cosaque zaporogue. 
Sacré Tarass, entre l'être sensible capable de verser des larmes, oui, oui... Mais pas forcément au moment et pour les raisons que l'on penserait ! La domination sous toutes ses formes, incluant bien entendu celle de la femme, réduite à une matrice... 
L'écriture est relativement neutre et je ne sais pas vraiment si les glorifications sont décrites pour être défendues ou plutôt dénoncées ; derrière la simplicité des mots relatant les meurtres et barbaries abominables ainsi que les « niaiseries » les justifiant, peut-être y-aurait-t-il une façon subtile de marquer sa réprobation et sa défiance sans le dire vraiment ou l'afficher dans une écriture qui pourrait risquer d'être censurée... Mais il semble que N. Gogol soit issu d'une lignée de cosaque (père hetman (chef quoi …) cosaque) ; par conséquent, la thèse la plus probable est d'une défense de la vie de ces cosaque et de leurs actes, pas trop ostentatoire pour n'en rester que plus crédible... 
 
 
72. C'est égal – Agota KRISTOF 
Février 2017. 
L'univers d'A. Kristof est vraiment unique. Ça pourrait parfois être Rimbaud. Ça frappe. C’est puissant, sec, vif. Ce sont des coups de machette, de massue... 
Tout ça avec quelques mots, quelques phrases concises, un brin mystérieuses et parlantes à la fois. Des mots qui parlent à autre chose que notre tête. 
Ces nouvelles dénoncent avec délicatesse la fatalité, l'ignorance que l'on a de la vie, du simple... 
Des nouvelles qui se goûtent, se dégustent. Une atmosphère parfois glauque, désabusée où l'auteur se moque aussi avec humour de l'existence et qui débouchent sans cesse sur des interrogations à caractère philosophique. 
Un vrai plaisir et une vraie découverte. 
 
 
73. Petit pays – Gaël FAYE 
4/2/2017 
 
L'histoire poignante de Gaby, mi français, mi rwandais, sa vie au Burundi, de l'insouciance aux massacres.. 
On est immergés dans la vie d'un gamin, presque comme les autres. Avant qu'il ne soit rattrapé par la monstruosité et l'horreur. On visite alors, au travers de ses familiers, ce qu'un homme peut devenir, comment on bascule et comment l'idéologie peut transformer un paradis en enfer. 
La force de ce récit tient bien sûr dans les pages difficiles de l'éclatement de la tempête au Rwanda puis au Burundi, de la perte des siens...mais aussi dan la tension permanente que l'on perçoit dans les scènes les plus anodines ou bucoliques, permanente, latente... 
L'écriture est précise et nette. Elle m'est parfois parue un peu courte, trop systématique. 
 
 
74. Arrête avec tes mensonges – Philippe BESSON  
29/1/2017 : 
Le livre se termine par une lettre...Et je pense , en référence à Isabelle : « et c'est exactement la lettre que tu aurais pu m'écrire. Toi qui ne m'a jamais écrit... ». 
 
Une histoire. D'abord un malaise persistant que j'attribue à la crudité des mots décrivant quelques scènes de sexe, d'amour homosexuel entre deux adolescents. 
L'histoire me plaît, l’écriture aussi, juste, précise et sans fioritures, mais quelque chose provoque presque une forme de rejet. 
Je mets la couverture de côté, elle comporte la photo de Thomas Andrieu, le partenaire de P Besson. 
Mais cet amour me happe. Par son impossibilité. Cet écart de l'un entre lui et lui-même. Cette résignation à penser que c'est ainsi et que ça ne changera jamais. Une vie à se mentir, jouer un rôle, faire acte de présence pour finalement se réfugier dans la seule retraite possible pour lui, l'absence et la négation. 
Une vie qui se termine par une corde. Mais non sans qu'il y ait eu cet acte qui « corrige », qui forme aveu, cet abandon de tous, de tout, total et non regretté ; non regretté parce qu'il « n'a pas eu le choix ». pas eu le choix que de se retirer, totalement, définitivement. 
Bouleversant. 
Il y a ces vies. Il y a nos vies. Il y a ces destins auxquels on pourrait échapper. Si ce n'était que notre destin est justement de ne pas y échapper... 
De cette soirée que j'aurais pu partager (« la grande librairie » ; voir le mail à Isa) à ce livre (achat inspiré par la présence de P Besson à l'émission) que je lis quelques semaines plus tard, pensant qu'il s'agissait d'une histoire familiale... Mais non, l'amour, toujours...Celui là même qui me touche, me persécute, me fait souffrir ou espérer ou renoncer... 
 
Ce livre, cette histoire me renvoient à moi-même, une fois encore. Qu'en faire ? Se confronter à la vie, ses bonheurs, plaisirs, rencontres, corps qui se frôlent et s'éloignent. 
Se confronter aux choix définitifs des uns, aux résignations des autres, aux thérapies encore, quand il ne reste plus que cela. 
Comme l'écriture. 
Celle de P. Besson. La mienne dans un autre registre. 
 
 
75. La chute -Albert CAMUS 
27/1/2017 : 
Il est des livres dont on ne ressort pas indemne. Probablement en est-il de la grande littérature. C'est le cas, sans aucun doute possible, avec « la chute ». 
Dans un mode de récit original, l'unique acteur s'adresse à un compagnon virtuel, ou plutôt bien réel puisqu'il s'agit de nous, lecteur. Il est question de l'homme, dans sa condition, ses comportements, ses dévoiements, ses petits arrangements, ses turpitudes et c'est dans un récit parfois violent que l'on découvre les plus intimes de nos écueils, la pauvreté derrière la richesse, l'ego derrière la modestie, la vantardise derrière l'humilité, l'amour égoïste derrière celui que l'on pense donner aux autres... Un tableau sans complaisance et sans concession, avec lequel je ne suis pas toujours d'accord, mais qui a le mérite de révéler ce qu'on n'ose parfois s'avouer, comme je l'avais déjà noté dans le passé (sans qu'il en soit le thème principal, à la différence de ce livre), avec des lectures de Dostoïevski. Ce livre est un bijou d'une richesse impressionnante qui mériterait d'être lu et relu pour s'en imprégner mieux. Même s'il est violent et brutal, il ne me fait pas mal ; au contraire, j'aime ce qui me révèle mieux, ce qui m'aide à mieux me comprendre, et à mieux comprendre ceux qui m'entourent. Ce livre devrait faire partie (peut-être est-ce le cas) des ouvrages incontournables de tout cursus scolaire _quoique je ne sois pas sûr que ce soit le meilleur moyen de le faire apprécier_ ou pour le moins d'une diffusion large. 
J'imaginerais volontiers que l'état distribue gratuitement à tout français, un ensemble de livres qui font son histoire profonde et riche et ouverte et idéaliste : le discours de la servitude volontaire d'E . de la Boétie, La chute d'A. Camus, Crime et châtiment de Dostoievski, Germinal d'E. Zola, le dernier jour d'un condamné de V. Hugo, les états d'âme de C. André ...et de la poésie... Des livres qui éveillent, qui aident et qui font des êtres pensants et non des pantins. 
 
 
76. La promesse de l'aube – Romain GARY 
18/1/2017 
J'ai eu un peu de mal à accrocher, je ne sais trop pourquoi mais ensuite, ce fut l'émerveillement d'une écriture d'une finesse absolue, belle, poétique en même temps que fluide et subtile tout en n'étant pas dénuée d'humour et d’autodérision. 
Le livre tient plus que la promesse de son titre. 
L'histoire de la vie de l'auteur, de SA vie et de la façon dont il l'a conduite au travers de l'influence de sa mère. Une belle façon au final de montrer à quel point nous sommes acteurs de ce que nous vivons, comment nous influençons tout ce qui arrive et comment nous le construisons. 
C'est sans parler de la richesse modeste de cette vie dont il est question. 
Un petit extrait : 
« je n'ai jamais imaginé qu'on pût être à ce point hanté par une voix, par un cou, par des épaules, par des mains. Ce que je veux dire, c'est qu'elle avait des yeux où il faisait si bon vire que je n'ai jamais su où aller depuis » 
 
 
77. Sur les chemins noirs – Sylvain TESSON 
26/12/2016 
J'ai découvert Sylvain Tesson au « 28 minutes » d'Arte. Personnage singuliers, baroudeurs et portant sur lui nombre de marques de la vie. Rescapé d'une chute de 8 m qui l'a laissé handicapé, défiguré par une paralysie faciale etc...Mais en vie. 
C'est le personnage et sa vision apparente de la vie qui m'interpellent, dans un premier temps plus que le livre qu'il est venu présenté. J'aime sa façon de voir les choses et d'en parler. Je sens quelqu'un de profond, mystérieux et modeste. 
Il me faut ce livre....que je demande au père Noël illico... 
Je ne serai pas déçu. S.T réalise son projet d'une traversée diagonale de la France à travers les chemins noirs, de l'hyper-ruralité. Évitant autant que se peut tout frottement avec les parties et axes « civilisés », défigurés souvent. 
Et quel choc de lire sa belle écriture et ce voyage, très intérieur... Où il démarre de l'extrême sud-est, frontière italienne, pour traverser le Mercantour, la Tinée...et ses loups... puis les gorges du Verdon, le plateau de Valensole, la Durance, pour passer une nuit au monastère de Ganagobie où j'étais en septembre dernier. Puis Sault, Bedoin, Malaucène où je reconnais les rochers qu'il décrit sans les nommer (voies d'escalade) : il emprunte alors exactement l'itinéraire que j'ai parcouru en avril dernier autour du Ventoux. Puis Séguret, traversée du Rhône, Vivarais, Cévennes, la Lozère et l'Aubrac...jusqu'au Cotentin. 
Je comprends pleinement pourquoi j'ai découvert ce personnage, qui a vécu seul pendant plusieurs mois au bord du lac Baïkal. 
Ce gars, c'est un peu moi. Ses mots sont aussi les miens. Ils auraient pu l'être sur le fond si j'avais eu son talent pour la forme... 
J'ai adoré ces états d'âme, souffrances, rencontres et déceptions, considérations désabusées, et parfois enthousiastes. 
 
 
78. Revenue guérie de l'au delà- Anita MOORJANI 
13/12/2016 
Depuis 2012 et « L'arbre du choix », aurais-je bouclé une boucle ? 
Il me semble que oui. 
Ce livre que Raymond Keller m'a offert lundi dernier n'arrive évidemment pas là du fait d'un quelconque hasard. 
De ce que j'ai découvert il y a 6 ou 7 ans, sans cesser de l'approfondir, le confronter à ce que je vis, sens et découvre, ce livre fait une sorte de synthèse où tout se rejoint comme je le constate si souvent, comme je le perçois et l'écris aussi. 
Je retrouve l'enseignement selon lequel tout est là, déjà, inné, intérieur, que nous sommes, tous, seuls, maîtres et disciples de nous-mêmes ; qu'il n'y a rien à faire, chercher ou requérir ; avec la certitude de ne plus avoir à rechercher de croyance, ni adhérer à un quelconque dogme, ou suivre une obligation de quelque nature qu'elle soit. 
Je retrouve les liens clairs qui m'apparaissent entre science et spiritualité, univers et microcosmes, moi et autrui, moi et le tout, la non-dualité... 
Je retrouve tout cela au travers d'une histoire de vie qui établit un lien et une cohérence que je n'avais pas encore, même si je les pressentais pour les effleurer régulièrement. 
La préface me gêne un peu plus par le remplacement que le DrWayne Dyer fait du Divin par Dieu, qui, de fait, nous renvoie davantage à une religion ou croyance en particulier... Mais c'est du détail. 
 
 
79. Soumission - Michel HOUELLEBECQ 
22/9/2016 
C'est du Houellebecq... Un sujet intéressant et original (une France qui bascule et se retrouve avec un président de la république musulman...), une écriture qui me plaît même si la fiction est un peu caricaturale parfois (des morts qui traînent de temps en temps sans que le personnage ne s'affole plus que ça...) et évidemment du sexe et des fantasmes casés ça et là, de même, on le sent bien, que des envies d'une société où la femme retrouverait une place soumise... On sent un peu trop le côté décadent et trash du personnage et surtout son mimétisme avec l'auteur. 
 
 
80. Les yeux des chiens ont toujours soif – Georges BONNET 
7/9/2016 – (père de Jacques Bonnet) 
Une écriture allant à l'essentiel, à la fois stricte et économe, comme la vie de ses personnages. Une ambiance à la « Simenon » dans le Paris modeste. Un point de vue du narrateur qui laisse percevoir son état d'esprit, une vision de la vie à la fois mélancolique, désenchantée et résignée, tout en étant dans la présence simple et le bonheur de chaque chose. 
 
 
81. Le joueur d'échecs – Stefan ZWEIG 
4/9/2016  
Mon premier livre de Stefan Zweig. Il va sans dire que c'est une belle écriture, très littéraire... On commence par se dire qu'il va être question d'un phénomène, champion du monde d'échecs, demeurés et inculte en plus d'être insolent... Mais non, le sujet est ailleurs ; il se présente sous forme d'un adversaire inattendu, dont on apprendra dans quelles conditions abominables il est parvenu à ce niveau de maîtrise du jeu... 
 
 
82. L'amour et les forêts – Eric REINHARDT 
30/8/2016 
Je ressort de ce livre... bouleversé, chamboulé, perturbé, ému, enthousiaste... Sentiment de plénitude et de stabilisation, dérouté et enjouée... Tout cela à la fois, pour des raisons que je vais essayer d'exprimer brièvement en guise de résumé du livre puisque le but est bien de résumer ce que je ressens d'un livre et non ce qu'il est en lui-même, ce qui, par essence, m'échappe. 
C'est d'abord une histoire belle et terrifiante que d'aucuns trouveront triste. Non, pas moi. Désarmante, révoltante aussi mais pas triste. Racontée avec talent, d'une écriture belle et originale par les différents points de vue d'observation adoptés (Bénédicte, l'auteur, l'ami, la sœur...). 
L'histoire paraît exceptionnelle, voire exagérée dans les caractères du personnage principal, autant que par les contrastes que ceux-ci présentent. Originale, artiste, amoureuse, rêveuse, ambitieuse et rangée, stricte, ordonnée, soumise jusqu'à la mort. 
Quant à son époux, il n'existe que dans l'inexistence, le vide. L'absolue déshumanisation d'un mal aimé, frustré et pervers jusqu'à l'extrême, jusque la mort lui-aussi, mais celle des autres ! 
J'ai aimé ce récit touchant et profond, décrit, souligné et analysé avec subtilité, émotion. 
Je parle d'analyse psychologique et émotionnelle rendant ce récit redoutable pour la simple raison que j'ai bien l'impression que dans les excès de Bénédicte et de son mari, chacun a à retrouver une partie de lui-même. 
Voilà probablement la plus grande cruauté du récit, c'est qu'il nous renvoie à nous-mêmes. En tout cas à moi ; je le répète, il s'agit de MON ressenti. Mais si ce n'est pas au lecteur qu'il ramène, je pense que c'est au moins à un proche, une connaissance.... 
Je retrouve ces parts de soumission et de résignation., de révolte et de combat, ces périodes de rêve enthousiaste ramenées à plat par le réalisme excessif ; le sombre et la lumière, le sourire et les pleurs, le courage et les peurs... La part de nos subconscients sur nos vies qu'on pense libres.  
Et cet excès absolu de lâcheté, de couardise et de cynisme de Jean -François, son mari. Abjecte jusqu'à l'extrême. Tellement abject qu'il m'autorise à me reconnaître en lui ! C'est en effet dans l'absolue aversion, jusqu'à vomir, vis à vis de son attitude, que je perçois subtilement certains de mes traits, dans des sentiments mal assumés, une possible indifférence, des attentions détournées, des humiliations sans excuses, des absences, et de gestes et de présence vraie! Cet infâme Jean François, c'est un peu moi. Un peu certes (ouf) mais un peu quand même. Et ce qui aurait pu me blesser parce que je ne voyais pas en quoi j'en étais, me rassure et me guérit parce que je le reconnais. 
Ce rapprochement senti très tôt dans le livre, des personnages qui évoluaient devant moi, des rapports qu'ils développaient... se concrétise davantage encore lorsque même les dates, la maladie sont similaire, me permettant de revivre encore ce que je n'ai pas fini d'explorer ; la période précédant la mort de Christine et dont je viens précisément de reprendre le « récit » il y a quelques jours. 
Il y a de la magie dans ces synchronicités qui nous apportent des livres en, nous les faisant tomber sur la tête (Cf. L'arbre du choix – Nicole CANIVENQ page 74) ou en les faisant acheter sur invitation d'une amie (Alicia sur facebook) à laquelle on répond dans l'instant, instinctivement, comme sur injonction, par nécessité. 
Merci 
 
 
83. Permaculture – Perrine et Charles HERVE-GRUYER(ferme du Bec Hellouin) 
8/2016 
Ce livre est passionnant parce qu'il m'a permis de découvrir des méthodes de culture absolument incroyables et respectueuses, parce qu'il est, au delà de ça, l'histoire d'une vie, d'un engagement, d'un modèle social, humble et ambitieux à la fois, et surtout une perspective réelle d'avenir bien plus forte et pragmatique que les projets politiques à la con de ceux qui sont encore nos élus.  
Lire un livre comme ça redonne l'espoir à ceux qui n'en ont plus et un regain d'énergie optimiste à ceux qui croient que tout est possible. 
 
 
84. Le petit vieux des Batignolles – Emile GABUREAUX (liseuse) 
24/7/2016 
Un titre trouvé par hasard parmi les livres libres de droits d'auteur... Une petite histoire policière au cœur du Paris du 19ème siècle, ses fiacres et ses vielles rues ; sa population et ses boutiques, emmenée par le duo de deux voisins, le premier se découvrant des instincts de limier et une intuition de policier en assistant le voisin dont il découvre qu'il appartient à la police après s'être interrogé avec curiosité sur le rythme et son mode de vie. Outre l'intrigue policière 'un assassinat, on y ressent, comme dans un Simenon, l'atmosphère de l'époque qui imprègne le récit. 
 
 
85. Le sourire étrusque – José Louis SAMPEDRO 
7/2016 
Livre prêté par PJ. 
La belle, tendre, émouvante et forte histoire d'un grand père calabrais découvrant la joie des sentiments, des gestes d'amour sur la fin de sa vie, à la rencontre avec son petit fils qu'il ne connaissait pas. 
Le Grand Père, pétri de rudesse et d'une tendresse cachée jusqu'alors, d'un rapport homme / femme jamais remis en cause, découvre la force des sentiments dans une double histoire d'amour avec son petit fils, Brunettino, et une rencontre amoureuse, alors qu'il se rend à Milan, ville que tout oppose à sa Calabre natale, gravement malade. Même antagonisme que l'on retrouve dans tout ce qu'il a expérimenté des sentiments dans sa vie passée et qui se dévoilent ici à lui. 
Du sourire des étrusques du musée de la villa Giullia au même sourire gravé sur le visage de Bruno.... 
 
 
86. Voyage dans les Cévennes avec un âne – Robert Louis STEVENSON 
7/2016 
Depuis le temps que je parcourais régulièrement les Cévennes, en chambre d'hôte, à moto, en voiture, seul ou en famille.... Que je côtoyais ce nom « Stevenson », sachant ce chemin qu'il avait parcouru sans en connaître ni le détail ni le vécu... C'est fait, j 'ai suivi Robert Louis Stenvenson dans son voyage au cœur de cette terre des Camisards, non seulement d'un région, ses paysage et la nature de la fin du 19ème mais aussi (surtout) dans sa rencontre avec une population, une culture, une histoire qui éclairent, tous ensemble, cette impression partagée que m'a toujours donné cette contrée, de mystère, de grandeur, de luminosité et ténèbres, d'austérité en même temps que de chaleur, de douceur et de rudesse. On comprends à travers ce parcours, comment une région modèle les cœurs et le climat qui font eux-même l'histoire transpirant alors à son tour sur les hommes et les paysages dans une boucle infinie.... 
En route avec Modestine battée, Stevenson, sa pipe et son havresac pour Florac, St Germain de Calberte, le Pont de Montvert, le Pompidou,,, 
 
 
87. La parole perdue – Frédéric LENOIR Et Violette CABESSOS 
6/2016 
Livre prêté par PJ. 
Je ne connaissais pas Frédéric Lenoir dans ce registre de Thriller... mais je retrouve à travers le livre toute son érudition et le caractère passionnant de ce qu'elle permet de découvrir. 
Une intrigue passionnante sur la parole perdue du Christ, ces quelques mots qu'il aurait écrit au sol, les seuls, devant marie de Béthanie, qu'il s'est refusé à condamner après l'adultère qu'elle avait commis ... « que celui qui n'a jamais pêché lui jette la première pierre... » 
Intrigue développée dans un triple récit sur 3 époques différentes : 279 avant JC à Rome et Pompéi... le moyen âge entre Cluny et Vézelay et l'époque actuelle sur les mêmes lieux. 
Non seulement l'intrigue est très bien menée mais je me suis pris de passion pour la description fabuleuse, en particulier sur l'antiquité, de la vie, des mœurs de l'époque, en partageant la vie du personnage central de Livia, jeune chrétienne de Rome, appelée à devenir esclave puis partager la vie d'un brillant philosophe de Pompéi... 
Une très belle page d'histoire, croisant Néron, Vespasien et son épouse Domitilla, ancienne esclave affranchie, la persécution des Chrétiens, la vie du quotidien des romains de l'époque.... 
 
 
88. Trois amis en quête de sagesse – Alexandre JOLLIEN - Christophe ANDRE – Matthieu RICARD 
6/2016 
Un joli livre de paroles partagées et d'échanges sur les aspects essentiel de la vie et de son sens grâce aux voies croisées de trois personnalités très complémentaire, convergentes en sommes même si elles nous offrent des points de vue différents par leur vécu et leur sensibilité, C. André, psychiatre avide d'aider, humble et fragile, A Jollien, philosophe émouvant et sincère en quête... et M Ricard, solide et profond altruiste.  
Un partage beau et intéressant  
 
 
89. Seule Venise – Claudie GALLAY 
Mi février 2016 – 1/3/2016 
 
Un roman comme j'aime. Sobre et dont l'écriture transcrit à merveille une atmosphère énigmatique et mystérieuse, autant que douce et d'une beauté lancinante... Celle de Venise. 
Ville dans laquelle le personnage, au lendemain d'une douleur amoureuse intense, soigne, guérit, revit grâce à la rencontre,possible, d'un libraire effleuré et celle, vraie, d'un prince russe, touchant. Des vies qui se croisent dans cette Venise troublante et mouvante, émouvante... 
Comme ce livre. 
 
 
90. les crocodiles ne pensent pas – Eric BARET 
Février 2016 
C'est un livre que j'ai lu par petites doses, pour mieux en assimiler le contenu, parfois compliqué dans la simplicité absolue qu'il veut « expliquer ». 
Une approche par la bonne porte d'un tantrisme dont souvent tout un chacun parle sans rien en connaître.  
Si je ne devais retenir qu'une chose, ce serait :  
« Il y a au départ cette intuition profonde du silence. 
Cette intuition est non duelle. 
Lorsqu'elle s’actualise, elle s'exprime dans la dualité, c'est à dire corporellement et mentalement. 
Le tantrisme est l'actualisation de cette intuition du silence dans l'espace temps ». 
 
 
91. MASSOUD – Michael BARRY 
Janvier 2016 
Un livre témoignant de l'incroyable connaissance de l'auteur de l’Afghanistan en particulier et de toute cette zone (Pakistan...) en général ainsi que des intérêts géopolitiques russes et transatlantiques qui se sont joués. 
Ce livre est une mine de connaissances, avec des explications, limpides souvent, même dans un contexte d'une complexité inouïe.  
A travers toute cette histoire, un homme, Massoud, Amad Shah Massoud (l'amer tayeb : le commandant seigneur) dans ses convictions, ses actes, ses erreurs et sa persévérance passionnelle. 
Passion pour son pays et pour son peuple, au delà de son ethnie tadjik, des luttes de clans... Un incroyable rassembleur, un exceptionnel commandant, un humaniste aussi, ayant connu, dans le début de sa courte vie de moudjahidin, des errements islamistes que ses actes ont largement corrigé pour tenter désespérément de reconstruire un pays indépendant et uni, face aux intérêts locaux, claniques et internationaux, des ambitions russes aux magouilles des américains manipulant et armant les pakistanais.... 
Massoud lâché aussi par l'Europe qu'il a appelé au secours jusqu'au bout ; à peine entrevu par la honteuse diplomatie française en avril 2001, reçu au parlement européen. 
Pour mourir sous les mains des talebans peu avant le 11 septembre 2001. 
 
 
92. L'appel de la forêt – Jack LONDON 
Janvier 2016 
Je n'étais jamais passé par Jack London. Peu de lecture dans ma jeunesse, mis à part les livres des bibliothèques verte et rose. 
Mais ce roman n'est en rien destiné aux enfants ! 
C'est une évasion, au sein d'un univers sauvage dans tous les sens du terme : préservé, naturel, infini et cruel aussi. 
Mais la cruauté est en fait toujours celle des hommes, de certains d'entre eux. Violents, bourreaux, irrespectueux de la vie même... 
Une évasion et une immersion, dans une vie qui ne nous est connue que par le truchement du rapport maître / animal, celle d'un chien et de sa vie... de chien, animé par sentiments et pensées, par l'instinct aussi, bousculé par des événements et épreuves auxquels il ne tourne jamais le dos ; le tout décrit et saisi avec un réalisme étonnant. 
C'est ici l'animal qui devient le vrai maître, exécute toute chose mû par la loyauté et la fidélité. Sentiments souvent absents du comportement des humains qui jouent les seconds rôles dans ce récit. 
Les descriptions des paysages et de la vie associée au grand nord sont d'un réalisme saisissant, d'autant plus saisissant que l'on sait que Jack London a écrit ce livre... à Papeete ! 
 
 
93. Qui fuis-je ? Où cours tu ? A quoi servons nous ? - Thomas D'ANSEMBOURG 
Je crois bien avoir acheté ce livre en 2002 ou 2003, à la Fnac de Strasbourg. J'en avais entendu parler dans une émission de radio et j'ai immédiatement su que ce livre me serait utile, m'était nécessaire. 
Cela ne m'a pas empêché de le laisser traîner pendant une bonne dizaine d'année. Avant, enfin, de l'ouvrir. 
J'en ai terminé la lecture en septembre 2015. Ce livre est riche, riche de nous ramener à l'essentiel, de nous le faire voir, sentir. L'essentiel qui est en nous et de ce que nous sommes face à l'univers. Rien et tout à la fois.  
Démonstration de l'absurde dualité qui sépare, qui nous sépare, nous coupe, nous isole. 
Il est une aide précieuse pour échapper à une « réalité » aveuglante, masquant toutes les subtilités et les beautés de la Vie dans sa plus belle compréhension. 
 
 
94. Toutes ces choses qu'on ne s'est pas dites – Marc LEVY 
30/10/2014 : Premier livre de Marc LEVY que je lis. J'ai aimé. Un peu moins emballé au début, déjà sur ma faim, mais un joli développement ensuite. 
J'ai aimé cette histoire d'une fille et son père, qui, ne s'étant que croisés durant toute une vie, ayant ignoré leurs sentiments respectifs, finissent par se retrouver plus entiers ; ceci au travers d'une mort simulée par le Père, pour mieux rencontrer sa fille, avec la patience nécessaire et indépendamment de toutes les contraintes, boulets et séquelles laissés par leur existence pétrie d'incompréhension. 
 
95. Le petit prince – Antoine de Saint EXUPERY 
8/10/2014 – relu 14/2/17 : 
Il est souvent inutile d'aller chercher très loin des paroles,d es textes spirituel. Le spirituel est dans le quotidien. Il est aussi bien entendu dans ce livre merveilleux qui nous fait retrouver notre âme d'enfant, innocente, intouchée, inaltérée et nous poser toutes les questions essentielles en même temps que d'y apporter des réponses par le simple fait de l'avoir posée correctement. Sans termes alambiqués, sans chercher midi à quatorze heures... 
Il y a d'abord la foi dans le rêve, le rêve qui est tout, qui est réalité bien plus que celle que nous nommons ainsi, déformée, enfermée dans des carcans, des dogmes, des idées et des plans « raisonnables ». 
Il est au delà, une sublime réflexion sur la réalité de l'être, de l'âme, du corps et de leur non dualité.  
Il manifeste lui aussi la symbiose de toutes les réflexions et réalités à caractère philosophique, spirituel, scientifique et religieux lorsque celles-ci ne sont pas dévoyées. 
CLMS au même titre que C'est égal – Agota KRISTOF page 58, Revenue guérie de l'au delà- Anita MOORJANIpage 61, Les états d'âme - Christophe ANDRE page 71etc... dans le domaine que je qualifie de spirituel. 
96. La source – Zilber KAREVSKI 
12/10/2014 : La vie bouleversée de Stojan, après le suicide de sa femme qui emporte sa fille, l'amène à partir sur les traces des mémoires familiales et ancestrales qui l'ont construites, dans les Balkans, en même temps qu'il recherche le pourquoi du geste de sa femme. En même temps qu'une recherche de racines, on assiste à un voyage dans la géographie de sa construction personnelle et des imbrications intimes du présent avec le passé. 
 
97. Bonjour tristesse – Françoise SAGAN 
09/2014 : j'aime ces romans, courts et puissants d'où se dégage un parfum de bonheur mêlés à un malaise et une culpabilité omniprésents, mais dont finalement la vie amène à s’accommoder. L'adolescente mature et lucide de 17 ans, au centre du roman, vit une existence confortable avec son père divorcé, des vacances bourgeoises et festives, pleines... Que vient perturber l'arrivée d'une femme plus rangée dans la vie de son père. Amenant avec elle des bouleversements de vie auxquels l'adolescente va tenter de mettre fin presque machiavéliquement. Dans une sorte de complicité, fille et père y parviendront indirectement et reviendront à ce qu'ils ne voulaient pas quitter. La culpabilité ne laissant finalement que peu de traces... 
 
 
98. De l'absence de Dieu au visage du Christ – Frère Philippe (Abbaye de Cîteaux) 
09/2014 
Frère Philippe est un des moines cisterciens de l'Abbaye de Cîteaux. Il s'occupe en particulier de l'hôtellerie et c'est à ce titre que je l'ai rapidement rencontré. Lors de mon départ, je luis disais ma foi et ma non croyance et il m'a orienté vers l'écrit d'un des frères, parti d'une foi inexistante jusqu'à l'abandon à Dieu en y consacrant sa vie. Je comprends rapidement qu'il s'agit de lui et me donne son récit. 
Découvrir un tel cheminement, partant de rien à la foi absolue en passant par les arts martiaux et le bouddhisme tibétain, me paraissait intéressant. J'ai donc lu son récit dans lequel, malheureusement, je n'ai pas eu d'éclairage particulier sur les raisons d'untel choix d'abandon, d'engagement et d'abnégation. 
Cependant, j'ai aimé voir à quel point il est attentif aux synchronicités et à ce que la vie lui amène à chaque étape, de la manière la plus appropriée. Il attribue cela à Jésus, qui le prépare, là où je vois les réponses de l'univers à une ouverture progressive vers sa voie. 
La conclusion est qu'il est allé vers sa voie, certes ; et qu’apparemment il l'a trouvée sans ambiguïté mais avec un brin d'aveuglement parfois. Je reproche aussi ce que je peux retrouver dans des psaumes etc... : un côté trop manichéen lié au bien et au mal, à Dieu et au diable trop personnifié. Un côté « jugement » de lui-même et des autres qui me dérange, en même temps que je suis persuadé qu'ils se trompent en pensant qu'il leur est demandé de souffrir pour accéder au paradis de cette vie future.  
La vie future est selon moi déjà là ! La vie terrestre est un passage dans le sens du « modèle de bon » et non de «l'épreuve de souffrance ». 
Mais je suis content quand même d'avoir partagé son récit, sincère, d'une pensée et d'un cheminement de vie. 
 
 
99. Les états d'âme - Christophe ANDRE 
09/2014 : 
C'est le petit manuel d'une cinquantaine de pages que j'ai lu, pas la version intégrale de 480. 
Passionnant ! Lumineux ! 
Je trouve vraiment que cet ouvrage est essentiel, à découvrir ; il devrait faire partie des livres de chevet que l'on propose à chacun, comme une chance pour comprendre... Et vivre mieux, vivre vraiment ! 
La manière dont il est écrit, par des « lettres » s'adressant directement à une jeune fille, commentées ensuite, est à la fois vivante, concrète, parlante et éclairée. 
Bref c'est un livre qui donne du baume au cœur, rend optimiste et confiant, en soi, en la vie. 
Un petit bijou. 
 
 
100. Qoëlet – François de GOURCEZ 
09/2014 : sur fond des ravages de la variole au XVIIIème siècle, des guerres de commerce et de voyages guerriers à travers le monde ottoman et indien, des passages à Pondichéry (subtils pour moi et éternellement associé à l'Ashram de Sri Aurobindo), on suit Qoëlet depuis sa Bretagne natale, vers laquelle il reviendra finalement mourir parmi le peuple des brumes. Entre-temps, il vivra un amour fou et impossible pour la pieuse Mme de Lauragais, mariée à un homme qu'elle n'aime pas ; il patientera, lettre quotidienne après lettre quotidienne, l'épiant du fond de l’église où elle fait des lectures, pendant plus d'un an avant que cette dernière ne lui ouvre finalement sa porte, éperdue de l'amour auquel elle avait renoncé pourtant, résignée dans sa vie de petite noblesse et négligée par un mari d'un autre monde. Il combattra pour imposer des idées nouvelles dans le domaine de la médecine, à l'instar de Voltaire dans bien d'autres domaines, face à l'intransigeance des certitudes cartésiennes et scientifiques de l'époque et au risque de sa vie. 
 
 
101. Crime et châtiment – Fédor Mikhaïlovitch DOSTOÏEVSKI 
08/2014 : Raskolnikov, Doietschka, Donestska, Rasoumikine … il faut quelques pages pour fixer les personnages et faire partie du tableau, des scènes auxquelles on assiste en spectateur privilégié, acteur presque. Mais cela vient plus vite que je ne le craignais et l'on plonge en eux ; on devient chacun des personnages, en particulier Raskolnikov, tant les pensées, l'esprit, l'âme de chacun sont dévoilées par Dostoïevski. On s'insinue dans les esprits éclairés ou perfides, rusés, saisissant chacun des méandres, naviguant dans les interrogations, les envies, les besoins et les émotions. Voyage passionnant dans la complexité de l'âme humaine ; là où d'autres auteurs décrivent si bien l'environnement, il est ici quasi inexistant. 
Raskolnikov, l'étudiant aimé et choyé de sa mère et de sa sœur, qui « dévie » et devient criminel d'une prêteuse sur gage (et fortuitement de sa fille) dont « la vie ne vaut pas grand chose » ; on se passionne pour le cheminement de policiers zélés et insaisissables, les errements passionnants de Raskolnikov dans son comportement, le refus de se vendre à la compromission, pour lui et sa sœur, promise à un mariage arrangeant... 
 
Une citation, non significative de ce livre, mais tellement vraie : « Cet étrange sentiment de satisfaction intérieure qui apparaît toujours, même chez les intimes, lorsqu'un malheur soudain accable le prochain, sentiment auquel chaque homme, sans exception, est sujet, indépendamment du plus sincère sentiment de pitié et de compassion » 
 
102. Oliver Twist – Charles DICKENS 
 
103. Sur un lit d'aspérules – Zilber KAREVSKI 
2014 : Une affaire criminelle sur fond de Gaume entre Arlon, Longwy, Athus etc... L'intrigue est bien menée et le suspens présent, le dénouement pas forcément attendu... Un livre sympa à lire et bien écrit. 
 
104. Le fabuleux destin d'Edgar Mint – Brady UDALL 
 
105. Au bonheur des dames – Émile ZOLA 
 
106. Le mec de la tombe d'à côté – Katarina MAZETTI 
 
107. Germinal – Émile ZOLA 
 
108. Théorème vivant – Cédric VILLANI 
Un livre que j'ai trouvé passionnant, où les pages entière d'équations indéchiffrables, ne le sont finalement pas. 
Un livre d'ouverture vers un monde où l'on sent qu'il est question d'intuition, de sensibilité voire d'émotions, plus que de rigueur cartésienne. On chemine vers la solution d'une énigme, à la manière d'une enquête policière : déductions, intuitions, rebondissements, déceptions, retour à zéro, recherche de la preuve, de l'élément clé... 
 
 
109. La carte et le territoire – Michel HOUELLEBECQ 
 
110. Socrate – Jésus - Bouddha – Frédéric LENOIR 
 
 
111. Revivre – Guy CORNEAU 
 
112. Le chevalier à l'armure rouillée – Robert FISHER 
 
113. Quand la maladie nous enseigne – Jean Patrick CHAUVIN 
 
114. La forêt muette – Pierre PELOT 
 
115. Naissance d'un pont – Maylis de KERANGAL 
 
116. La mort est un nouveau soleil – Elisabeth KÜBLER-ROSS 
Un livre qui m'a enseigné des ouvertures et permis de voir, dans des moments où l'horizon était bouché. Un point de vue, que l'on considère souvent comme ésotérique, vu, analysé et défendu par un esprit scientifique. : EKR médecin, qui a passé sa vie à étudier des personnes en fin de vie. Je parle bien sûr de la mort, de l'au delà, de ce qu'il y a en dehors de cette terre, de cette vie terrestre. 
 
 
117. Conseils du cœur – DALAÏ LAMA 
 
118. L'arbre du choix – Nicole CANIVENQ 
Début 2012 : Le premier livre que j'ai lu après le décès de Christine. A proprement parlé, il m'est tombé sur la tête, de la bibliothèque, comme un signe flagrant que je me devais de le lire. 
C'était un appel. Un message ouvert vers une autre réalité que la réalité terrestre avec laquelle j'avais encore affaire.  
L'histoire d'un bouleversement de vie d'une personne « rangée » et formatée comme nous le sommes tous. 
Tout allait pour le mieux dans les trépidations d'un monde normal jusqu'à cet accident qui vient tout changer, tout renouveler et donne à voir à l'auteur une facette à côté de laquelle elle était passée. Une facette qui, en fait, n'est autre à ses yeux que le sens profond de la vie. 
Ce n'est pas de la littérature mais un témoignage poignant, vivant, réjouissant.
Quelques impressions, commentaires qui n'engagent que moi...
© Eric Benoit