Le monde, les hommes s’épuisent. A vouloir changer ce qui n'est pas de leur ressort. Diriger, régenter, contrôler pour soumettre et exploiter.
Voilà le dessein favori de notre espèce. Et les résultats sont là, mesurables, en euros sonnants et trébuchants. Grisants et enthousiasmants, ils incitent à recommencer, poursuivre pour faire pondre davantage la poule aux œufs d'or, jusqu'à l'épuisement, la disparition, la mort...
Peu importe qu'elle meure, il y en a une autre derrière, toujours une autre, corvéable, malléable, toute neuve et toute fraîche, trop contente d'avoir enfin une place dans cette société ou « être » passe forcément par la position sociale...
Parce que l'homme désormais est celui du temps court, du temps qui court et lui qui court aussi après le temps, comme un idiot cherchant à rattraper ce qu'il propulse lui-même à dix pas devant lui ; même un âne ne se laisse plus prendre à cette carotte grotesque ! L'homme est aveugle par construction, les mains collées sur les paupières.
Et ainsi on alimente ce qui n'est qu'une terrible illusion, un leurre parfait dont le seul objectif est de détourner l'homme de sa véritable destinée, lui faire oublier ce qui l'entoure, ceux qui l'entourent. Le détourner et le distraire, du matin jusqu'au soir surtout, sans interruption et par tous les moyens possibles. Lui faire oublier tout, jusqu'à ce qu'il est vraiment, son essence et la seule chose capable de donner sens, justifier son passage. Lui octroyer de temps à autre l'obole d'une récompense, quelques jours de congés, un peu de temps avec ses enfants, ses proches... Tout ce dont il devrait profiter chaque jour qui est. Mais même ces « récompenses » sont marquées du sceau de l'impérialisme qui nous gouverne : on leur dit aussi comment passer ce temps libre, comment le dépenser, le combler de voyages polluants et chers, de films loués, de biens accumulés...
Oui, c'est vraiment ce système parfait, parfaitement huilé qui est à refaire, de A à Z. Il ne peut pas y avoir de petits « gains » car derrière ce modèle, il y a la terre et ce qu'elle a supporté jusqu'à aujourd'hui. Et ce système ne peut survivre en poursuivant son exploitation à outrance derrière la belle « croissance ». Si ce système se poursuit, la terre « vivable » est foutue. Et nous avec.
Mais ce n'est pas si grave. La terre se passera de nous. Comme le dit si bien Hubert Reeves, « il y a eu des millions d'espèces avant nous sur la terre, d'espèces qui se sont éteintes en partie aussi, la terre n'a pas besoin de nous, nous ne sommes pas l'espèce élue »